L'expert
de Technidouanes, qui
est consultant indépendant
depuis 12 ans, a été
conseiller scientifique
auprès de l'administration
des douanes et chargé
de mission au secrétariat
de la défense
nationale (SGDSN).
Il évoque ci-dessous
la pratique des contrôles
des exportations d'avant
la réforme ministérielle
française de
2010 qu'il a connu,
et explique la pratique
actuelle.
Histoire
des "BDU"
La "guerre froide" entre les pays occidentaux et
les pays communistes, commencée dès la fin de
la guerre par le problème de l'occupation de
l'Allemagne, a été accentuée très
rapidement par les actions d'espionnage technologique de la
part du monde soviétique.
Les premières constatations de transferts illicites
des technologies occidentales ont eu lieu en 1949 après
la mise au point de l'arme nucléaire en ex-Union
soviétique. Celle-ci fut intégralement copiée
sur la bombe américaine de Nagasaki par l'action de
réseaux d'espionnage communistes dont faisaient partie
les époux Rosenberg, condamnés en 1950 puis
exécutés sur la chaise électrique en
1953.
Dans le courant des années 50, dès les premiers
essais de l'arme thermonucléaire par les USA,
l'ex-Union soviétique a réalisé des
essais équivalents de bombes super-puissantes qui,
manifestement, résultaient de transferts illicites de
technologies américaines par les réseaux
d'espionnage russes.
Par la suite, dans les années 70 et 80, plusieurs pays
ont réussi la mise au point d'armes nucléaires,
chimiques et biologiques et de leurs vecteurs en se procurant
les équipements et technologies à usages civils
dans le commerce international.
Ces évènements ont été à
l'origine de la création de plusieurs instances
internationales en vue d'une mise en oeuvre de contrôles
des biens à double usage (civil et militaire) pour
lutter contre la prolifération des armes de
destruction massive.
Dès le début de la "guerre froide",
les USA ont engagé des conversations bilatérales
avec la France, l'Italie, le Royaume Uni, les Pays-Bas, la
Belgique et le Luxembourg pour créer un groupe
consultatif informel constitué de représentants
gouvernementaux afin d'éviter les détournements
de matériels stratégiques vers les pays du bloc
soviétique. En 1950, en s'adjoignant un secrétariat
permanent, ce groupe consultatif a évolué en
Comité
de coordination pour le contrôle des échanges
multilatéraux (sigle anglais COCOM)
; auxquels se sont joints ultérieurement, le Canada,
le Danemark, l'Allemagne, le Japon, l'Australie, l'Espagne,
la Grèce, l'Australie , Portugal et la Turquie.
Quatre des six pays fondateurs du COCOM se sont partagés
les rôles clés, à savoir : la présidence
italienne, le personnel britannique, le siège
américain (ambassade des USA à Paris), les
réunions exclusivement en France, et le bilinguisme
anglais/français.
En 1982, suite à l'affaire Farewell (voir ci-dessous),
le groupe consultatif chargé des orientations
politiques du COCOM a été remplacé par
une assemblée de haut niveau qui a réactivé
cette instance intergouvernementale et l'a organisée
en plusieurs structures d'une réelle efficacité
: le comité exécutif, le comité régulier
et ses différentes formations, les sous-comités,
les groupes de travail et les groupes ad-hoc. Toutes les
décisions du COCOM suivaient des procédures
établies par les structures supérieures et se
prenaient à l'unanimité. De nombreuses réunions
à haut niveau ont eu lieu au cours des années
80 pour accroître la lutte contre les transferts de
technologies vers les pays de l'est, puis au début des
années 90 pour tenir compte de l'évolution
rapide de la technologie et pour mettre fin à
cet embargo suite à la chute du mur de Berlin.
L'objectif du COCOM était de créer trois listes
de biens stratégiques (liste nucléaire, liste
militaire et liste de biens à double usage) et de
refuser ou d'autoriser les exportations vers les pays du
"bloc soviétique" et la Chine de ces
matériels et technologies sensibles. Ces exportations
étaient proposées par les états membres
à la suite des demandes de licence de la part de leurs
industriels, mais elles étaient souvent refusées
après avis défavorables des gouvernements ou de
leurs services de renseignement. L'embargo de fait résultant
de l'action du COCOM permettait aux états
démocratiques de maintenir une avance technologique
militaire par rapport aux états totalitaires, mais
cette avance était toujours rattrapée par suite
de nombreux détournements de destination finale.
Le COCOM a été dissous en 1994 suite à
une dernière réunion à haut niveau sous
présidence hollandaise, qui, constatant l'évolution
de la conjoncture internationale et la mondialisation des
progrès techologiques, a décidé de le
convertir en un "nouveau forum", qui est
devenu, deux ans plus tard, l'arrangement de Wassenar.
L'arrangement de
Wassenaar (WA)
L' Arrangement
de Wassenaar (sigle anglais WA), de son nom
complet l'arrangement de Wassenaar sur le contrôle
des exportations d'armes conventionnelles et de biens et
technologies à double usage, est un régime
multilatéral de contrôle des exportations mis en
place par une quarantaine d'États afin de coordonner
leurs politiques en matière d'exportations d'armements
conventionnels et de biens et technologies à double
usage. Il a été établi le 12 mai 1996
à Wassenaar,
aux Pays-Bas, et succède au COCOM. Il intègre
la plupart des pays de l'ex-bloc soviétique et
rassemble 42 états.
Le principal document est un document d'instructions, le
Purposes, Guidelines and Procedures, including the Initial
Elements, qui décrit les buts, procédures,
participations et administrations de ce traité. Un
secrétariat est installé à Vienne, où
des réunions se déroulent, habituellement une
fois par an en décembre. Sous son régime, la
seule obligation est de notifier les transferts d'armes. La
décision de transférer revient uniquement au
vendeur.
L'arrangement de Wassenaar publie plusieurs listes de
contrôle :
lists of dual goods and technologies (notes
sur les technologies et les logiciels ; catégories de
biens à double usage, de 0 à 9 ; liste de
biens sensibles ; liste de biens très sensibles) ;
munitions list (liste de matériels de
guerre).
Le Comité
Zangger et le Groupe des fournisseurs nucléaires (NSG)
Parallèlement au COCOM, d'autres groupes informels de
lutte contre les transferts illicites d'équipements
très sensibles se sont formées pour éviter
la dissémination de la technologie des armes
nucléaires, mais ils sont restés indépendants
vis à vis du COCOM dont le seul but était de
maintenir des restrictions qualitatives contre le "bloc
soviétique" et la Chine.
Le Comité
Zangger (du nom de son premier président
le suisse Claude Zangger) est un régime multilatéral
de contrôle des exportations qui a été
constitué en 1971 par des États exportateurs et
producteurs de biens et technologies nucléaires, à
la suite de l'entrée en vigueur du Traité
de non-prolifération nucléaire (TNP.
L'objectif du Comité, qui existe encore, est de
s'assurer que les technologies nucléaires
exportées vers des États non dotés
d'armes nucléaires qui n'ont pas adhéré
au TNP, ne sont pas détournées à des
fins militaires. La liste de contrôle est limitée
à une "Trigger list"concernant les matières
fissiles et des équipements de production
correspondants. Le Comité Zangger s'assure de
garanties d'usage civil des produits et technologies
fournies. C'est ainsi qu'il a autorisé l'exportation
en Inde d'uranium et de d'installations de de
conversion et d'enrichissement sous réserve d'un usage
exclusivement civil, alors que l'Inde n'avait pas signé
le TNP et procédait à une industrie nucléaire
à des fins militaires à partir du thorium (par
manque d'uranium).
C'est précisément parce que le Comité ne
se focalisait que sur les États qui ne sont pas
parties du TNP que les États producteurs et
exportateurs de technologies nucléaires ont décidé
en 1974, suite à l'essai nucléaire effectué
par l'Inde, de créer le Groupe
des fournisseurs nucléaires (sigle
anglais NSG) afin d'harmoniser leurs politiques
d'exportations en la matièreet de prévenir la
prolifération nucléaire. Dans un premier temps,
le Groupe des fournisseurs nucléaire a été
appelé « Club de Londres ».
Il s'agissait d'un nouveau régime multilatéral
de contrôle des exportations couvrant les exportations
nucléaires vers tous les États, qu'ils soient
ou non parties du TNP.
Le NSG a été créé trois ans après
le Comité Zangger afin de le compléter et de
pallier ses manquements. Ainsi, les prérogatives du
NSG ne sont pas limitées aux dispositions du TNP :
les contrôles mis en place par le Groupe peuvent dès
lors couvrir un spectre plus large de biens et technologies
et évoluer parallèlement au progrès
technologique. D'autre part, les contrôles institués
par le NSG concernent les exportations vers tous les pays,
même ceux qui ne sont pas membres du TNP. Le NSG publie
deux listes :
en partie I, la liste des biens nucléaires à
double usage correspondant à la "Trigger list"
du Comité Zangger ;
en partie II, la liste des produits et technologies à
double usage nécessaires à la fabrication
d'armes nucléaires.
Le NSG a connu une période de relatif déclin
entre 1978 et 1990. En 1992, les révélations
concernant le programme nucléaire de l'Irak (qui avait
été élaboré, entre autres, grâce
à des biens et technologies à double usage
jusqu'alors estimés peu susceptibles d'être
détournés à des fins militaires) ont été
l'occasion de revitaliser ce régime de contrôle
multilatéral et d'en renforcer les dispositions
(notamment afin de mieux contrôler les biens et
technologies à double usage).
Le Régime de
contrôle de la technologie des missiles (MTCR)
Le Régime
de contrôle de la technologie des missiles
(sigle anglais MTCR) est un régime multilatéral
de contrôle des exportations visant à limiter la
prolifération des armes de destruction massive en
contrôlant les transferts des missiles pouvant servir
de vecteur pour ces armes. Le MTCR a été créé
en 1987 par le Canada, la France, l'Allemagne, l'Italie, le
Japon, le Royaume-Uni et les États-Unis. Depuis ce
temps, le MTCR compte maintenant trente-quatre pays, et tous
ont un droit égal au sein du Régime.
Le Groupe
d'Australie (AG)
En 1985, suite au constat par les Nations Unies d'utilisation
d'armes chimiques par l'Irak au cours de sa guerre contre
l'Iran et sachant que la constructions d'usines
chimiques irakiennes résultait de transferts de
matériels et de technologies occidentales libres à
l'exportation, il a été créé à
l'initiative de l'Australie une nouvelle instance
internationale, le Groupe
d'Australie (sigle anglais AG), présidé
par l'Australie, se réunissant uniquement à
l'ambassade d'Australie à Paris et constitué
exclusivement de personnels australiens. Le Groupe
d'Australie s'est intéressé également
aux produits et équipements biologiques suite aux
preuves de programmes de fabrication d'armes biologiques dans
certains pays. Son but est d'établir des listes de
produits et d'équipements chimiques et biologiques à
contrôler (et d'échanger des renseignements en
vue de la lutte contre la prolifération des armes
chimiques et biologiques).
L'organisation pour
l'interdiction des armes chimiques(OPCW).
L' Organisation
pour l'interdiction des armes chimiques
(sigle anglais
OPCW) a été créée à la
suite de la convention d'interdiction des armes chimiques.
Cette instance officielle a son siège à La
Haye. Son but est d'assurer la destruction des armes
chimiques produites dans les états signataires de la
Convention et de contrôler les installations chimiques
susceptibles de dissimuler des activités clandestines.
La liste des produits chimiques soumis à contrôle
est celle qui figure en annexe à la convention ; elle
comporte les précurseurs chimiques de la liste du
groupe d'australie et des produits dangereux susceptibles
d'une utilisation malveillante.
Le "Contrôle
de la destination finale" au cours des années 80
L'efficacité du COCOM a été mise en
cause au début des années 80 à la suite
du pillage technologique au profit de l'ex-URSS révélé
par agent du KGB, appelé Colonel Vetrov et connu sous
le nom de "Farewell", qui a vendu au
contre-espionnage français (l'ex-DST) des documents
secrets russes destinés au "Soviet suprème"
faisant le bilan financier des vols de multiples technologies
militaires ultra-secrêtes recueillies notamment aux USA
en Grande Bretagne et en France..
Cette sinistre découverte a été révélée
au président américain Reagan par le président
français Miterrand au début de son premier
septennat. Cette affaire Farewell a fait l'objet d'un
incident diplomatique entre la France et l'ex-URSS suite à
l'expulsion en avril 1983 d'une quarantaine de "diplomates"
russes en poste à Paris. Le colonel Vetrov a été
assassiné lors d'un retour imprudent en Russie.
Les 17 états du COCOM se sont ressaisis en publiant,
en 1985, une nouvelle liste de biens et technologies
sensibles et en renforçant leurs contrôles
multilatéraux. Dès lors, en France, les
services du contre-espionnage (ex-DST) et de la douane ont
mis en évidence et sanctionné des transferts
illicites de produits et technologies à usage civil et
militaire, notamment vers l'ex-URSS.
A l'époque de l'affaire Farewell, la règlementation
en matière de "contrôle de la
destination finale" existait en France sous forme
d'un avis aux importateurs et aux exportateurs publié
au journal officiel de la république française
(JORF) en 1976. Ce texte publiant la liste de biens soumis à
contrôles établie par le COCOM était
fondé sur un décret de 1944 dont le but
était d'instituer une protection du commerce extérieur
du fait de la situation économique précaire du
temps de la libération. Ce décret se référait
à une loi de 1938 relative à l'organisation de
l'économie en temps de guerre.
Compte tenu du formidable développement de
l'informatique et des technologies militaires au début
des années 80, la règlementation en
vigueur était devenue totalement obsolète, mal
comprise et passée dans l'oubli. De plus, son
fondement juridique était particulièrement
contestable.
Les autorités françaises se sont ressaisies en
publiant au JORF l'avis aux importateurs et aux exportateurs
du 5 décembre 1985 contenant la liste des produits
stratégiques d'une centaine de pages révisée
cette année là au COCOM.
En juillet 1987, un incident diplomatique entre les Etats
Unis et le Japon s'est produit lors de l'exportation de
machines-outils à cinq axes coordonnés
simultanément (au moyen d'une commande numérique
norvégienne), par un société japonaise
en vue de la fabrication d'hélices silencieuses pour
sous-marins russes, alors que le Japon était un état
membre du COCOM.
Les autorités japonaises se sont alors aussitôt
empressées de révéler qu'une grande
entreprise française avait commis une faute
équivalente en exportant vers l'ex-URSS des
machines-outils de grandes dimensions pour la construction
d'avions gros-porteurs. Cette dénonciation a aboutit
de la même manière à un incident
diplomatique entre les USA et la France, membre actif et
fondateur du COCOM. Cette affaire française a conduit
l'ex-DST à mettre en examen cinq dirigeants de
l'entreprise concernée et à les placer en
détention préventive pendant plusieurs mois
pour "intelligence avec l'ennemi".
Les Etats-Unis se sont inquiétés de la vente
aussi facile des machines outils à cinq axes
coordonnés simultanément, non seulement pour le
motif officiel invoqué, mais aussi en raison des
risques d'exportation des moyens d'usinage de surfaces
courbes et parfaitement précises à partir
d'équations mathématiques complexes en vue de
la production d'enveloppes d'armes nucléaires.
A partir de ce scandale et d'autres protestations
diplomatiques américaines contre le non respect par la
France de ses engagements pris au COCOM, plusieurs transferts
illicites de technologies ont été constatés
par la direction nationale du renseignement et des enquêtes
douanières (DNRED) et leurs auteurs ont fait l'objet
de poursuites judiciaires de la part de l'administration des
douanes.
Les Etats membres du COCOM ont été en effet de
plus en plus conscients des transferts clandestins de
technologies sensibles dans tous les domaines, notamment en
ce qui concerne la microélectronique et l'informatique
dont les usages militaires, à l'époque, ne
faisaient que progresser
La France a constaté des exportations sans licences de
matériels et de technologies de production de circuits
intégrés au silicium ou à l'arséniure
de gallium organisées par un homme d'affaires bien
connu des services de renseignement pour ses activités
de commerce de produits de hautes technologies avec les pays
du "bloc communiste".
En 1987, un équipement français soumis à
contrôle de la destination finale et exporté
sans licence vers l'ex-URSS par cet industriel devenu
"l'ennemi n° 1" en europe a été
intercepté en transit par les douanes
luxembourgeoises. La personne concernée a fait l'objet
d'un procès au Luxembourg au cours duquel il a
prétendu qu'une interdiction d'exporter de la part
d'un état-membre de la Communauté européenne
était contraire au droit européen, ainsi que
les sanctions pénales infligées dans ce cas. La
Cour de cassation luxembourgeoise a alors saisi la Cour de
Justice de Communautés européennes (CJCE) d'une
question préjudicielle sur cette affaire. La Justice
européenne a rendu un arrêt selon lequel la
politique des exportations était de la compétence
de la Communauté européenne, mais
qu'exceptionnellement un état-membre pouvait interdire
des marchandises en transit pour des raisons de sécurité
intérieure ou extérieure et infliger des
sanctions proportionnées à la gravité de
l'infraction (Cf. arrêt C-367/89 du 4 actobre 1991).
De même, de 1984 à 1988, plusieurs installations
industrielles de chimie organique, soumises au contrôle
en Allemagne par un texte appelé
Aussenwirtschaftsverordnung (AWV) du 14 mai 1984 relatif aux
échanges extérieurs, ont été
exportées sans licence vers l'Irak et interceptées
par les douanes de Hambourg. Les industriels concernés
ont contesté à la fois la réglementation
en vigueur et les poursuites pénales engagées
contre eux, ce qui a amené la justice allemande à
déposer une question préjudicielle à la
CJCE qui a finalement rendu un arrêt selon lequel la
politique des exportations était de la compétence
de la communauté européenne mais qu'un
Etat-membre pouvait exceptionnellement interdire ou contrôler
certaines exportations pour des raisons de sécurité
intérieure et extrieure et infliger des sanctions
pénales proportionnées à la gravité
de l'infraction (Cf. arrêt C-83/94 du 17 octobre
1995).
Suite à la mission d'enquête de l'ONU
consécutive à l'utilisation d'armes chimiques
pendant la guerre Iran-Irak et compte tenu de l'absence de
réglementations pour le contrôle des produits et
équipements chimiques et biologiques dans de nombreux
pays exportateurs, les états industrialisés,
conscients des détournements de leurs usages
industriels de précurseurs et d'équipements
spéciaux pour la production de toxiques de guerre, se
sont réunis à l'ambassade d'Australie à
Paris à partir de l'année 1987 pour établir
des listes de contrôle et former une instance
intergouvernementale qu'ils ont appelé le Groupe
d'Australie.
A la même époque et suite à un recours
auprès du Conseil d'Etat de la part d'une
entreprise française contre la réglementation
en vigueur, le ministre du budget (chargé des douanes)
a rattaché implicitement l'avis aux importateurs et
aux exportateurs contesté à un arrêté
portant application de l'article 215 du Code des douanes
qu'il a publié le 24 septembre 1987. Cette base
juridique fragile et provisoire, simplement fondée sur
le contrôle par les agents des douanes de la détention
et du transport marchandises prohibées au titre des
engagement internationaux, a été instituée
en attente de la finalisation d'un projet de loi, souvent
annoncé mais jamais présenté en conseil
des ministres.
En 1988, beaucoup d'affaires graves ont été
mises à jour. Cette année là, l'Iran a
importé des poudres et explosifs produits en France ;
l'Irak s'est procuré en Angleterre des condensateurs
et des éclateurs destinés à l'amorçage
d'armes nucléaires ; le Pakistan s'est approvisionné
en équipements de production d'armes nucléaires
dans différents pays occidentaux ... etc. Le dossier
de presse du ministère de l'économie, des
finances et du budget intitulé "La douane en
1988 - Activités et résultats" a fait
état de "58 constatations significatives en
matière de contrôle de la destination finale
portant sur des matériels d'une valeur globale
de 566 millions de francs effectués en 1988 (environ
91 millions d'euros). Il était précisé
: " La majeure partie des infractions relevées
(54) consistent en fausses déclarations d'espèce
à l'exportation visant à éluder la
production d'une licence ou à permettre l'expédition
de matériel vers une destination pour laqiuelle aucune
autorisation d'exporter ne peurt être délivrée.
Le Code des douanes indique qu'une fausse déclaration
d'espèce de nature à éluder une mesure
de prohibition, c'est à dire une déclaration
frauduleuse sur la nature de la marchandise, équivaut
à une exportation sans déclaration (action de
contrebande).
Pour éviter ces fausses déclarations d'espèce,
la direction générale des douanes et droits
indirects a entrepris à cette époque la mise à
jour de la nomenclature des produits (ex-NDP), dont les
rubriques étaient des subdivisions des sous-positions
tarifaires et statistiques de la nomenclature du tarif
douanier commun permettant de citer les biens soumis au
contrôle de la destination finale. Ces travaux réalisés
par la douane en collaboration avec les services de
l'industrie ont duré assez longtemps compte tenu du
volume important de biens à codifier et de la
difficulté d'effectuer une corrélation entre
les codes douaniers des marchandises et les codes des biens
soumis au contrôle de la destination final dont les
logiques étaient différentes. Suite à
une initiative de la France, des travaux de corrélation
entre la liste du COCOM et les sous-positions du système
harmonisé de codification et de désignation des
marchandises ont eu lieu au COCOM entre fonctionnaires des
douanes des pays membres de cette instance internationale.
Les travaux d'intégration des codes de la liste des
produits listés au COCOM dans l'ex-NDP sont finalement
devenus caducs, d'une part en raison de la refonte de la
liste en un "noyau dur" de 10 nouvelles
catégories (correspondant aux 10 rubriques américaines
de de biens sensibles) et d'autre part du fait de la fusion
du tarif douanier commun avec la nomenclature statistique
européenne (ex-NIMEXE) en application du règlement
n° 2658/87 du Conseil relatif à la nomenclature
tarifaire et statistique du tarif douanier commun, entré
en vigueur le 1er janvier 1988. Ce règlement créait
une nomenclature combinée à huit chiffres (NC)
obtenue par subdivision des sous-positions à six
chiffres du système harmonisé de codification
et désignation des marchandises (SH), ainsi qu'un
tarif intégré communautaire (TARIC) à
dix chiffres obtenu par subdivision des sous-positions NC à
huit chiffres et prévu pour prendre en compte des
mesures communautaires spécifiques.
L'administration des douanes se trouvait alors dans la
situation où les produits stratégiques avaient
perdu leur codification spécifique sur laquelle se
basaient les contrôleurs des douanes pour surveiller
les exportations de marchandises appelées "biens
stratégiques"
L'avis aux importateurs et aux exportateurs relatif au
contrôle de la destination finale des produits de
hautes technologies a fait l'objet d'un refonte le 5 mars
1988 suite à la révision de la liste du COCOM
de 1987. Mais les exportations illicites ont continué
malgré la vigilance des douaniers qui ont été
mis en garde des risques de prolifération des armes de
destruction massive par le détournement de biens
civils à des fins malveillantes. En particuler, la
direction nationale du renseignement et des enquêtes
douanières (DNRED) a été saisie par la
DGDDI de nombreuses enquêtes consécutives à
des renseignements sur les turpitudes de certaines
entreprises françaises. Notamment, en février
1989, un implanteur ionique chargé dans un camion et
exporté sans licence vers l'ex-URSS, via l'Italie, a
été intercepté par la douane à
Grenoble pour l'empêcher de partir, et a fait l'objet
d'une plainte de la part de la DNRED. Mais cette affaire a
fait l'objet d'incidents de procédure et de
batailles d'experts sur la nature de la marchandise et n'a
finalement pas abouti à un jugement en faveur de la
douane.
L'administration des douanes, sous tutelle du ministère
du budget, manquait de moyens juridiques pour empêcher
les fuites technologiques permettant à tout état
malveillant de produire des armements "non
conventionnels". A l'époque, la douane ne pouvait
engager des poursuites qu'en application du code des douanes
sous forme d'un "acte introductif d'instance fiscale"
(prescription limitée à trois ans). Par
ailleurs, l'ex-DST pouvait engager des poursuites en
application du code pénal (avec prescription de dix
ans), mais la qualification d' "intelligence avec
l'ennemi" en vigueur à l'époque
n'était prévue que pour des activités
illicites effectuées en temps de guerre et non pour
des opérations de commerce international, ce qui
constituait également une base juridique contestable.
Malgré la grande discrétion des administrations
françaises sur leur participation aux travaux du COCOM
et sur leur lutte contre la prolifération, les
turpitudes françaises couvertes par le secret défense
ont été dénoncées et décrites
en détails par un journaliste américain
bizarrement très bien informé, Kenneth
Timmerman, dans son livre "La
Grande Fauche" publié
chez Plon en 1989. Cette publication montre que les
autorités américaines étaient au courant
des agissements clandestins de la part de beaucoup
d'entreprises françaises, et ont fait pression sur la
France, membre fondateur du COCOM, pour qu'elle respecte ses
engagements et accentue ses contrôles sur les produits
et technologies stratégiques dont elle disposait en
tant que grande puissance industrielle et militaire
En France, beaucoup d'affaires consécutives aux
infractions portant sur le "contrôle de la
destination finale" se sont terminées en
justice par des non-lieu qui, même maintenant, ne
peuvent être révélées. Ces échecs
judiciaires de la part des administrations françaises
ont résulté de la légèreté
de ce texte, de la lenteur des procédures et de
beaucoup de vides juridiques résultant de la non
transposition dans la règlementation française
des accords conclus dans les instances intergouvernementales
traitant de la lutte contre la prolifération des armes
de destruction massive (armes nucléaires, chimiques,
biologiques et leurs vecteurs). En effet, les listes du
groupe d'Australie, du groupe des fournisseurs nucléaires
et du régimes de contrôle de la technologie des
missiles, toutes créées en 1987, n'ont pas été
immédiatement reprises dans des avis aux importateurs
et exportateurs comme celle du COCOM. C'est ainsi que,
contrairement à l'Allemagne, la France n'a pas pu
obtenir de condamnations pour les exportations illicites vers
la Lybie, l'Irak, le Pakistan, et autres, suite à
l'assistance apportée clandestinement au développement
des programmes nucléaires, chimiques ou balistiques de
ces pays.
Beaucoup de pays ayant tardé à publier des
réglementations en matière de contrôle
des moyens de production d'armes chimiques et biologiques,
malgré leur participation au groupe d'Australie, un
contrôle de certains produits chimiques a été
institué par le règlement du Conseil européen
n° 428/89 du 20 février 1989 suite à la
conférence internationale sur les armes chimiques qui
a eu lieu à Paris du 7 au 11 janvier 1989.
Les transferts illicites vers l'ex-URSS ont contitué à
tel point que l'embargo vis à vis du "bloc
communiste" était devenu quasiment inopérant
compte tenu des profits à réaliser par
intermédiaires peu scrupuleux, à tel point que
le président de l'ex-URSS, Michaïl Gorbatchev
aurait dit à l'époque que "les hommes
d'affaires occidentaux seraient capables de vendre la corde
avec laquelle ils se feraient pendre".
L'évolution
au cours des années 90
La chute du mur de Berlin a totalement modifié la
conjoncture internationale en matière de lutte contre
la prolifération. Le COCOM a remanié la liste
des produits visés en un "noyau dur"
de 10 catégories copiées suivant le modèle
américain et représentant l'essentiel des biens
et technologies sensibles. Puis l'Italie a perdu la
présidence du COCOM au profit des Pays Bas. Les
réunions à haut niveau et des différents
comités ne se sont plus tenues à Paris (comme
cela avait été le cas pendant quarante ans). Le
français a été abandoinné et
l'anglais est devenu la seule langue de travail. Finalement,
le COCOM a été dissout en 1994 et remplacé
par une organisation intergouvernementale dont le siège
a été installé à Wassenaar aux
Pays-Bas et son secrétariat à Vienne, en
Autriche.
La guerre du golfe et les menaces libyennes ont conduit les
pays modernes à accentuer leur vigilance sur le
commerce des produits des hautes technologies susceptibles
d'un usage malveillant. D'autant que les réseaux
d'approvisionnement d'équipements à usage
nucléaire pour le Pakistan et la Corée du Nord,
bien connus mais jamais démantelés,
représentaient une menace sur la stabilité
internationale ; et que les essais nucléaires et
ballistiques de l'Inde, de la Chine et du Pakistan,
montraient que les pays en voie de développement
parvenaient à se procurer tous les matériels
nécessaires au développement des armes
nucléaires malgré l'existence des contrôles.
A cette époque, la lutte contre la prolifération
des armes de destruction massive était supervisée
au niveau interministériel par le Secrétariat
général de la défense nationale (SGDN),
devenu maintenant le secrétariat général
à la défense et à la sécurité
nationale SGDSN).
L'ouverture des frontières européennes a été
réalisée au 1er janvier 1993 et l'Etat risquait
de ne plus pouvoir exercer aucun contrôle sur les biens
stratégiques. Mais, grâce l'initiative de
l'ex-SGDN qui a pris conscience de ce grave inconvénient
à partir du mois d'octobre 1992, les matériels
de guerre et les biens et technologies à usage tant
civil que militaire ont continué à faire
l'objet de restrictions à l'exportation en application
des accords internationaux (informels mais réels) de
"lutte contre la prolifération des armes de
destruction massive" par la présentation
d'un amendement du Gouvernement avant le vote et la
promulgation de la Loi du 31 décembre 2012 portant sur
diverses dispositions administratives et fiscales. Cette loi,
qui fut un "fourre-tout" de textes divers sur de
multiples sujets différents, votés et
promulgués en urgence à la veille de la
libération des échanges entre états
européens, a donc permis, in extremis, de maintenir un
contrôle sur les produits stratégiques.
Finalement,
l'Union européenne a pris en charge la lutte contre la
prolifération des armes de destruction massive en
publiant le règlement (CE) du Conseil n° 3381/94
du 19 décembre 1994, fondé sur l'article 113 du
Traité européen (politique commerciale
commune)"instituant
un régime communautaire de contrôle des
exportations de biens à double usage"complété
par la décision n° 94/942/PESC du 19 décembre
1994 dans le cadre de la politique étrangère et
de sécurité commune regroupant les listes de
toutes les instances internationales de contrôle en une
seule liste de biens à double usage (BDU).
L'Union européenne considérait en effet
notamment :
que, dans la réalisation du marché intérieur,
la libre circulation des marchandises, y compris des biens à
double usage, devait être assurée conformément
aux dispositions pertinentes du traité; que les
échanges intracommunautaires de certains biens à
double usage étaient soumis à des contrôles
par les États membres; qu'une condition de la
suppression de ces contrôles était
l'application, par les États membres, de contrôles
aussi efficaces que possible, sur la base de normes
communes, à l'exportation desdits biens, dans le
cadre d'un régime communautaire de contrôle des
exportations de biens à double usage; que la
suppression de ces contrôles améliorerait la
compétitivité internationale de l'industrie
européenne;
qu'il était également l'objectif du présent
règlement de soumettre à un contrôle
efficace les biens à double usage lors de leurs
exportations de la Communauté;
qu'un système de contrôle efficace à
l'exportation des biens à double usage sur une base
commune était nécessaire également en
vue de respecter les engagements internationaux des États
membres et de l'Union européenne, notamment en
matière de non-prolifération;
que des listes communes de biens à double usage, de
destinations et de lignes directrices étaient des
éléments essentiels d'un dispositif de
contrôle efficace; que les décisions portant
sur le contenu de ces listes étaient de nature
stratégique et relèvaient, par conséquent,
de la compétence des États membres; que ces
décisions faisaient l'objet d'une action commune au
titre de l'article J.3 du traité sur l'Union
européenne.
Ce « système trans-pilier », jugé
dès son adoption comme devant être transitoire,
a été invalidé par deux arrêts de
la Cour de justice des Communautés européennes
en 1995, consécutif à un recours d'une
entreprise allemande, jugeant que le contrôle devait
relever exclusivement de la politique commerciale commune.
Les textes français pris en application des
règlementations européennes ont été
les suivants :
l'arrêté du 5 mai 1995 relatif au contrôle
à l'exportation vers les pays tiers et au transfert
vers les Etats membres de la Communauté européenne
de biens à double usage ;
l'arrêté du 5 mai 1995 relatif au contrôle
à l'exportation des biens à double usage
relevant de la lutte contre les proliférations
chimique et biologique ;
l'arrêté du 3 août 1995 relatif au
contrôle à l'exportation des biens à
double usage industriels relevant du contrôle
stratégique communautaire ;
l'arrêté du 14 juin 1996 relatif à la
licence générale G. 205 pour l'exportation du
graphite de qualité nucléaire ;
l'arrêté du 8 août 1996 relatif au
contrôle à l'exportation des biens à
double usage relevant de la lutte contre la prolifération
nucléaire ;
l'arrêté du 18 juillet 1997 relatif au contrôle
à l'exportation des biens à double usage
relevant de la convention sur l'interdiction de la mise au
point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des
armes chimiques et sur leur destruction.
Mais, en 1995, dès l'élection de Jacques Chirac
comme Président de la République et de la
nomination d'Alain Juppé comme chef du
Gouvernement, ce service du Premier Ministre a subi une
réforme profonde qui a réduit ses effectifs des
deux tiers. Dès lors chaque ministère était
devenu autonome pour gérer la lutte contre la
prolifération des armes de destruction massive et
l'action était menée de fait par le ministère
chargé de l'industrie, qui disposait seulement de
trois ingénieurs pour étudier les demandes de
licence et participer aux réunions internationales
d'experts.
Le désintérêt de la France à
l'égard du COCOM consécutif à
l'effondrement de l'Union soviétique après la
chute du mur de berlin l'a conduite à une perte de
vigilance sur les trafics illicites de biens civils
susceptibles d'un autre usage, terroriste ou militaire.
C'est alors que l'Union européenne a pris conscience
de la nécessité d'ue action commune et en
matière de sécurité et la liste des
biens à double usage a été mise à
jour par la décision du Conseil européen
1999/193/PESC du 9 mars 1999.
Ce système était valable pour les entreprises
honnêtes déclarant correctement leurs
marchandises dans leurs licences d'exportation, mais cela
restait une "ligne Maginot" n'empêchant
pas l'approvisionnement illicite en composants d'armes de
destruction massive par fausses déclaration d'espèce,
du fait de l'absence d'une codification des produits
stratégiques nécessaire pour le travail de
surveillance de la part des contrôleurs des douanes.
Le contrôle
des "Biens à double usage" dans les années
2000
Un nouveau système de contrôle reposant
exclusivement sur le "premier pilier" de
l'Union européenne a été adopté
par la publication du règlement n° 1334/2000 du 22
juin 2000 en application de l'article 115 du traité.
La liste des biens à double usage (y compris les
logiciels et technologies) a alors été publiée
en annexe 1 à ce règlement, au lieu de faire
l'objet, comme auparavant, d'une décision séparée
dans le cadre de la politique étrangère et de
sécurité commune (PESC).
Le texte français pris en application de cette
règlementation européenne a été
l'arrêté du ministre de l'économie et des
finances du 13 décembre 2001, signé par le
directeur général des douanes et droits
indirects qui fut chargé de l'exécution des
nouvelles dispositions en matière de BDU.
Suite aux attentats du 11 septembre 2001 à New York et
aux menaces terroristes consécutives aux évènements
en Irak et en Afghanistan, l'Union européenne s'est
inquiétée des risques de destruction massive de
la part d'organistaions terroristes lors de deux réunions
du Conseil européen en juillet et décembre 2003
et le Conseil de Sécurité des Nations Unis a
préconisé un renforcement des contrôles
des biens à double usage par la résolution n°
1540/2004 du 28 avril 2004. Cette résolution a conduit
l'Union européenne à publier des règlements
instaurant des mesures restrictives contre l'Iran (423/2007)
et la Corée du Nord (1110/2008) en application de la
politique étrangère et de sécurité
commune. Le Conseil de sécurité a été
obligé de renouveler cette résolution en en
2008 car celle de 2004 était restée sans suite
en ce qui concerne les biens à double usage. Cette
action des Nations Unies s'est finalement traduite, au niveau
européen, par une refonte du règlement de base
sur les biens à double usage au moyen du règlement
n° 428/2009 entré en vigueur le 27 août
2009.
Pour l'application effective de ces règlements par les
administrations des douanes européennes, la Commission
européenne a intégré dans la base de
données du tarif intégré communautaire
(TARIC) les articles et alinéas des biens faisant
l'objet de listes de mesures restrictives au titre de la
lutte contre la prolifération. En 2006, elle a publié
une liste de corrélation entre les sous-positions du
TARIC à 10 chiffres et les articles et alinéas
de la liste des biens à double usage, qui a été
reprise dans les systèmes informatiques de déclaration
en douane opérationnels dans les pays européens
(DELTA en France)
En fait, il s'agissait d'une corrélation entre la
nomenclature combinée à 8 chiffres et la liste
des biens à double usage puisque les deux derniers
chiffres étaient 00. Cette liste, qui a été
vaguement mise à jour en juillet 2012, ne portait pas
sur toutes les sous-positions de la nomenclature combinée
contenant des biens sensibles. A l'inverse, elle visait des
biens précis encadrés dans des sous-positions
portant sur une multitude de marchandises ne présentant
aucun caractère stratégique. De surcroît,
cette liste de corrélation comportait d'innombrables
erreurs de classement. Tout cela a conduit à de
nombreux blocages en douane de biens libres à
l'exportation et a constitué, en pratique, une entrave
aux exportations européennes et un encouragement aux
transferts clandestins de biens à double usage.
Pendant soixante ans, le contrôle de la destination
finale et par la suite celui des biens à double usage
(BDU) ont été gérés par
l'administration des douanes. Les demandes de licence étaient
adressées au service des autorisations financières
et commerciales (ex-SAFICO), appelé ensuite service
des titres du commerce extérieur (ex-SETICE) qui
dépendait de la direction interrégionale des
douanes d'Ile de France. Ces licences étaient
délivrées après avis du ministère
chargé de l'industrie qui consultait, le cas échéant,
les ministères concernés (intérieur,
défense, affaires étrangères ...). Les
divergences de vues entre départements ministériels
étaient arbitrées au niveau des Services du
Premier ministre.
Le décret n° 37 du 17 janvier 2009, dans sa
version initiale, a mis fin au rôle primordial de la
douane en créant une mission de contrôle des
biens à double usage placée sous l'autorité
d'un ingénieur en chef de l'armement. Cette mission
fut constituée du personnel douanier du SETICE et de
plusieurs ingénieurs recrutés par
l'ex-direction générale de la compétitivité,
de l'industrie et des services (ex-DGCIS) du ministère
chargé de l'industrie, devenu maintenant la direction
générale des entreprises (DGE), pour
l'instruction des demandes de licence et la participation aux
réunions interministérielles et
internationales. Ceci fut une étape provisoire de la
réforme de 2010.
Les dispositions de lutte contre la prolifération des
armes de destruction massive ont fait l'objet d'une refonte
totale par la publication du règlement n° 428/2009
du Conseil du 5 mai 2009 "instituant un régime
communautaire de contrôle des exportations, des
transferts, du courtage et du transit de biens à
double usage". Ce texte en vigueur dans toute
kl'Union européenne est introduit par deux
considérants importants indiquant son fondement
juridique (considérants n°s 14 et 15) :
Le considérant introductif n° 14
Il se réfère au "plan d'action de
Thesalonique" adopté lors du Conseil européen
du de juin 2003, complété par la "stratégie
ADM de l'Union européenne" adoptée
ensuite lors d'un nouveau conseil européen de décembre
2003.
(14) Les chefs d'État ou
de gouvernement de l'Union européenne ont
adopté en juin 2003 un plan d'action en
matière de non-prolifération des armes de
destruction massive (ci-après dénommé
le «plan d'action de Thessalonique»).
Celui-ci a été complété par la
stratégie de l'Union européenne contre
la prolifération des armes de destruction massive
adoptée par le Conseil européen le 12
décembre 2003 (ci-après dénommée
la «stratégie ADM de l'Union
européenne»). Conformément au chapitre
III de cette stratégie, l'Union européenne
doit utiliser tous les instruments dont elle dispose pour
empêcher — notamment par la dissuasion —,
pour arrêter et, si possible, éliminer les
programmes de prolifération qui sont une cause
d'inquiétude au niveau mondial. Le point 30.
A) 4) dudit chapitre porte spécifiquement sur la
nécessité de renforcer les politiques et les
pratiques en matière de contrôle des
exportations.
Le considérant introductif n° 15
Il rappelle que le Conseil de Sécurité des
Nations Unies, par sa résolution n° 1540 (2004) du
28 avril 2004, a inviét les états à
mettre en place des dispositifs intérieurs de contrôle
destinés à prévenir la prolifération
des armes nucléaires, chimiques ou biologiques ou de
leurs vecteurs.
(15) Dans sa résolution 1540 (2004) adoptée
le 28 avril 2004, le Conseil de sécurité des
Nations unies a décidé que tous les États
doivent prendre et appliquer des mesures efficaces afin de
mettre en place des dispositifs intérieurs de
contrôle destinés à prévenir la
prolifération des armes nucléaires,
chimiques ou biologiques ou de leurs vecteurs, y compris
en mettant en place des dispositifs de contrôle
appropriés pour les éléments
connexes, et qu'à cette fin ils doivent,
entre autres, mettre en place des dispositifs de contrôle
du transit et du courtage. Les éléments
connexes sont des matières, équipements et
technologies couverts par les traités et
arrangements multilatéraux pertinents, ou figurant
sur les listes de contrôle nationales, susceptibles
d'être utilisés aux fins de la
conception, de la mise au point, de la fabrication ou de
l'utilisation d'armes nucléaires,
chimiques ou biologiques ou de leurs vecteurs.
Au début des année 2000, craignant un attentat
encore plus meurtrier que celui du 11 septembre 2001 à
New York de la part d'organisations terroristes et
connaissant les risques réels de prolifération
des armes de destruction massive (nucléaires,
chimiques, biologiques et balistiques), les USA ont annoncé
en mai 2003 la création d'une initiative de sécurité
contre la prolifération (sigle anglais PSI) dont les
11 états fondateurs ont été l'Allemagne,
l'Australie, l'Espagne, les Etats-Unis, la
France, l'Italie, le Japon, les Pays-Bas, la Pologne,
le Portugal et le Royaume-Uni.
La PSI aurait été créée à
l'occasion d'un contrôle pour non conformité aux
règles du droit maritime, par la marine espagnole le
10 décembre 2002, d'un navire nord coréen en
route vers le Yémen, qui cachait sous une fausse
cargaison 15 missiles SCUD complets, 15 ogives d'explosifs
"conventionnels" et un comburant pour ces missiles.
Lors de leur première réunion plénière
qui s'est tenue à Paris le 3 et 4 septembre 2003, les
11 états fondateurs de la PSI ont publié une
"Déclaration des principes d'interdiction"
contenant des objectifs concrêts de contrôle des
trafics aériens, maritimes et terrestres de produits
des hautes technologies par une coopération des moyens
et la mise en oeuvre de moyens coercitifs. Par la suite,
beaucoup d'autres états se sont associés à
cette initiative et 21 d'entre eux ont formé un groupe
opérationnel d'experts (sigle anglais OEG) constituant
l'enceinte de coordination de la PSI et se réunissant
chaque année pour définir des objectifs suivant
les "Principes de Paris" à partir des
renseignements et des moyens que chacun des
participants pouvait fournir. Actuellement, une centaine de
pays ont adhéré à la PSI et peuvent être
appelés à coopérer pour empêcher
les trafics clandestins de biens figurant essentiellement
dans les listes des instances inter-gouvernementales de lutte
contre la prolifération.
Le ministère des affaires étrangères a
fait connaître officiellement l'existence de cette
coopération internationale de la manière
suivante dans son site internet http://www.diplomatie.gouv.fr
:
Les enjeux
L'Initiative
de sécurité contre la prolifération
(PSI) a pour objectif delutter
contre les transports illicites d'armes de
destruction massive, de leurs vecteurs et des matériels
connexes,
dont la prolifération est qualifiée de
menace à la paix et à la sécurité
internationale par le Conseil de sécurité
des Nations Unies (résolution 2004/1540). Elle
vise à renforcer la coopération
opérationnelle entre les États participants
pour interrompre les flux proliférants par mer,
dans les airs et sur terre.
La
PSI n'est pas une organisation, mais une initiative
internationale, qui se caractérise par sa
flexibilité (participation strictement volontaire
et absence de structure permanente) et son pragmatisme
(réunion entre experts et professionnels).Elle
ne remplace pas les instruments existants de lutte contre
la prolifération (traités et régimes
de fournisseurs) mais s'appuie sur ces derniers et
vient les compléter par des mesures
opérationnelles. Elle s'inscrit dans le
respect des lois nationales et des règles de droit
international, en particulier celles émanant du
Conseil de sécurité de l'ONU ou de la
Convention internationale sur le droit de la Mer (Montego
Bay, 1982).
L'Initiative
est ouverte à tous les pays disposés à
lutter contre la prolifération des armes de
destruction massive, et qui ont la volonté de
coopérer pour mettre fin aux transferts de biens
pouvant être utilisés dans la fabrication de
telles armes.A
la fin de l'année 2012, 102 pays soutiennent
volontairement cette initiative et ont adhéré
à ses objectifs, élaborés à
Paris en 2003 (appelés "Principes de Paris").
Les 21 pays les plus engagés dans leur mise en
oeuvre forment le Groupe des experts opérationnels
(OEG).
L'engagement de la France
La
France participe depuis le début à la PSI.
Elle a accueilli la 3ème réunion plénière
les 3 et 4 septembre 2003, au cours de laquelle les États
participants ont agréé laDéclarationsur
les principes d'interception(dit
"Principes de Paris") qui fixe les objectifs de
l'Initiative et les engagements des États
pour y parvenir. Elle a également accueilli en
septembre 2008 une nouvelle réunion de l'OEG
qui a été l'occasion d'avancées
significatives, notamment en intensifiant les échanges
entre partenaires sur des cas concrets. Un accent tout
particulier a aussi été mis sur la
sensibilisation de nouveaux pays et des opérateurs
du domaine du transport.
De
plus, la France a planifié l'organisation de
plusieurs exercices multinationaux d'interception
maritime (Basilic 2003 en Méditerranée, et
GUISTIR 2008 dans le golfe d'Aden) et aérienne
(ASPE 2004 et HADES 2006 en France). Elle participe
régulièrement aux exercices organisés
par ses partenaires (Leading Edge ; Eastern
Endeavor).
À
l'avenir, le renforcement de la PSI implique à
la fois d'élargir l'Initiative à
de nouveaux partenaires et de compléter les outils
à disposition de tous les États pour
contrer les flux proliférants.
Du point de vue opérationnel, la PSI a permis aux
participants de mener de nombreuses opérations qui se
sont avérées concluantes, c'est-à-dire
qui ont concrètement interrompu des trafics de
matières, biens ou équipements proliférants
et illicites.
Le
renforcement des contrôles à partir de l'année
2010
La France a renforcé son dispositif juridique par la
publication au JORF du 20 mars 2010 d'une série de
décrets et d'arrétés modifiant
l'organisation des contrôles (dernière
modification : 1er avril 2010). Le texte principal est le
décret n° 2010-292 du 18 mars 2010 relatif aux
procédures d'autorisation d'exportation, de transfert,
de courtage, et de transit des biens à double usage et
portant transfert de compétences de la direction
générale des douanes à la direction
générale de la compétitivité, de
l'industrie et des services (DGCIS), devenu maintenant la
direction générale des entreprises
(DGE). L'arrêté du 13 décembre 2001
relative à la gestion des biens à double usage
a été modifié par l'arrêté
du 18 mars 2010.
Après un an de fonctionnement, la mission de contrôle
des biens à double usage de l'ex-DGCIS est donc
devenue le service des biens à double usage (SBDU) à
effectifs renforcés. Créé par arrêté
du 18 mars 2010, le service des biens à double usage
a eu pour missions :
de mettre en oeuvre, dans les conditions fixées
à l'article 3, la réglementation relative au
contrôle de l'exportation, du transfert, du courtage
et du transit des biens et technologies à double
usage, et notamment d'instruire les demandes
d'autorisations, de certificats et de classement ainsi que
d'effectuer les notifications afférentes ;
de contribuer, par son expertise, à la concertation
interministérielle des travaux relatifs aux biens et
technologies à double usage, et assure, à ce
titre, le secrétariat de la commission
interministérielle des biens à double usage ;
d'assurer les relations avec les organes étrangers de
contrôle de l'exportation des biens et technologies à
double usage et avec la Commission européenne, pour
l'application des règlements (CE) du Conseil susvisés
;
de s'associer à la préparation et à la
conduite des négociations européennes et
internationales relatives au contrôle des exportations
des biens et technologies à double usage ;
de développer une expertise et une analyse
prospective des biens et technologies à double usage,
en concertation avec les ministères concernés
;
de conduire les actions d'information et de sensibilisation
des entreprises, en relation avec les ministères
Par ailleurs, il a été créé une
commission interministérielle des biens à
double usage (CIBDU) auprès du ministre des affaires
étrangères et européennes par décret
2010-294 du 18 mars 2010. Cette commission formule des avis
sur toute question relative à l'exportation, au
transfert, au transit et au courtage de biens et technologies
à double usage, notamment en matière de
classement et de réglementation ; elle se prononce sur
l'application de l'article 4 du règlement n°
428/2009 permettant d'interdire ou de soumettre à
licence des biens non repris sur les listes de contrôle
... etc.
Enfin, la législation française en matière
pénale a été clarifiée. L'article
706-167 du code de procédure pénale, créé
par loi n° 2011-266 du 14 mars 2011, a, en effet, énuméré
les infractions sanctionnées par le code de la
défense, le code des douanes et le code pénal
en matière de prolifération des armes de
destruction massive, à savoir :
les infractions relatives aux matières et aux armes
nucléaires et aux biens connexes aux matières
nucléaires prévues par les 1° et 2° du
I de l'article L.
1333-9et
les articles L.
1333-11, L.
1333-13-1 à
L.
1333-13-6 et
L.
1333-14
du code de la défense ;
les infractions relatives aux armes biologiques ou à
base de toxines prévues par les articles L.
2341-1, L.
2341-2, L.
2341-4 et L.
2341-5 du
même code ;
les infractions relatives aux armes et produits chimiques
prévues par les articles L.
2342-57 à
L.
2342-61 du même code ;
les infractions relatives à la prolifération
des vecteurs d'armes de destruction massive prévues
par les articles L.
2339-14 à
L.
2339-16 du
même code ;
les infractions de livraison d'informations à une
puissance étrangère prévues par les
articles 411-6
à 411-8
du code pénal
lorsque ces infractions sont en relation avec
l'une des infractions mentionnées aux 1° à
5° du présent article ;
le délit de participation à une association de
malfaiteurs prévu par l' article
450-1 du code pénal
lorsqu'il a pour objet de préparer l'une
des infractions susvisées.
Les listes des biens faisant l'objet de mesures de
restrictions à l'exportation vers certains pays (Iran,
Corée du Nord ...) ont été constamment
mises à jour depuis l'année 2010 en fonction de
la conjoncture internationale et des résolutions de
nations unies. Quant à l'annexe I au règlement
n° 428/2009 concernant la liste des biens à double
usage, elle a été révisée par
règlement n° 388/2012 du 19 avril 2012. Elle est
encore en cours de révision par suite des mises à
jour des listes des instances internationales réalisées
depuis 2012 ; la nouvelle liste des BDU tarde maintenant à
être publiée.
La
menace des dictatures et des organisations terroristes
Les risques de prolifération des armes de destruction
massive ne font que croître. Une menace de destruction
par le feu a été clairement exprimée par
le président de la république populaire et
démocratique de Corée (Corée du Nord).
Cet état a réussi, pendant longtemps, à
se procurer clandestinement les équipements et
technologies de production d'armes nucléaires et
d'engins balistiques en achetant des biens à double
usage dans les pays occidentaux. Ce pays a bénéficié
de l'existence de réseaux organisés par un
expert scientifique pakistanais bien connu dans le passé
de tous les services de renseignement et de la presse
spécialisée. Ceux-ci n'ont jamais été
démantelés. Tout autre état totalitaire
pourrait ainsi nous menacer de destruction massive.
Les américains ont peut-être eu tort d'entrer en
guerre contre l'Irak pour éliminer le régime de
Saddam Husseim, et la France a peut-être commis une
erreur de s'attaquer à la Lybie pour neutraliser celui
de Mohammar Khadafi, mais ces deux dictateurs avaient la
réelle volonté de se doter d'armes "non
conventionnelles". L'usine de Rabta en Libye et celle de
Fallujah en Irak (démantelée sous le contrôle
de l'Organisation des Nations Unies après la seconde
guerre du golfe) étaient bien des unités de
fabrication d'armes chimiques construites au moyen
d'ingénieries et d'équipements européens.
La présence d'armes de destruction massive en Irak
(nucléaires et biologiques) a certainement été
un prétexte de la part des américains pour
entrer en guerre une deuxième fois contre l'Irak, mais
il faut se souvenir qu'avant d'envahir le Koweit, Saddam
Hussein s'était vanté, devant les journalistes
du monde entier, d'avoir réussi à se procurer
des éclateurs nécessaires à la
fabrication de détonateurs pour armes nucléaires.
Il n'avait pas hésité à se faire filmer
en montrant un kryton, acheté en Angleterre, qu'il
tenait dans la main.
Le meurtre d'Houssama Ben Laden, considéré
comme l'instigateur de l'attentat suicide du 11 septembre
2001 contre le World Trade center à New York, n'a pas
supprimé le problème du terrorisme dans le
monde. Les actions terroristes n'ont fait que croître
au cours de ces deux premières décennies du
XXIème siècle. Soit par des fusillades à
la kalashnikof, soit par des attentats à la voiture
piégée, soit par des attentats suicides à
la ceinture d'explosifs ...etc. Presque chaque semaine, on
entend à la radio ou à la télévision
qu'une explosion a causé quelque part des dizaines,
voire des centaines de morts et de blessés.
D'ailleurs, l'emploi de bombes artisanales est
malheureusement est devenu courant. Il suffit de faire un
mélange de produits combustibles et comburants et de
le remplir dans une bouteille de gaz vide ou un autocuiseur
ménager (bombe à la cocotte). Cela arrive non
seulement au moyen orient où ce genre d'attentat est
fréquent, mais aussi en Angleterre, en Espagne, aux
Etats Unis (au marathon de Boston). Des attentats
particulièrement meutriers ont été
commis au moyen d'un mélange à base de nitrate
d'ammonium et de fioul (ANFO) en Irlande du Nord. Plus
récemment, à Oslo en 2011, un individu
norvégien d'extrême droite a commis un massacre
à Oslo en faisant exploser une camionnette chargée
d'ANFO obtenu à partir de plusieurs sacs d'engrais
agricole causant la mort d'au moins 10 personnes, avant de
tuer une cinquantaine d'adolescents réunis sur une
petite île voisine par une fusillade interminable.
Le risque d'attentats à l'explosif ne fait que croître
car des recettes de bombes artisanales et de systèmes
de mise à feu sont communiqués sur internet par
des mouvements terroristes ; elles sont souvent cryptées
et retransmises au moyen des réseaux sociaux.
Depuis plusieurs années, des menaces de la part des
organisations terroristes se sont développées à
la suite du démantèlement des états
libyen, irakien et afghan, et de la guerre civile en Syrie
qui n'a cessé de s'envenimer. Les invasions de
mouvements islamistes en afrique noire a nécessité
des interventions terrestres et aériennes françaises.
La progression territoriale de l'état islamique au
moyen orient (appelé maintenant DAESH) a nécessité
des frappes aériennes en Irak et en Syrie de la part
de grandes puissances. La France voulait se limiter à
des bombardements en Irak, mais elle a finalement été
obligée de neutraliser des camps d'entraînement
d'islamiques radicaux pour des raisons de "légitime
défense". Les crimes contre l'humanité
commis par ce mouvement terroriste de grande ampleur a
constitué un prétexte d'intervention militaire
de la part de la Russie pour soutenir le régime
politique syrien au pouvoir. Il faut donc craindre que cette
escalade de violences n'aboutisse à un attentat de
grande ampleur aux Etats Unis, en Europe, en Afrique du Nord,
au Moyen orient, ou ailleurs, par des moyens de destruction
massive "non conventionnels".
Pour prévenir tous ces riques, la Loi n° 2015-912
du 24 juillet 2015 relative au renseignement a autorisé
les différents services spécialisés
français à recourir à des techniques
surveillance en ajoutant un huitième livre au code de
la sécurité intérieure, dont le titre V
indique les moyens et l'article L 811-3 les objectifs à
poursuivre :
"Art. L. 811-3.-Pour le seul exercice de leurs
missions respectives, les services spécialisés
de renseignement peuvent recourir aux techniques
mentionnées au titre V du présent livre
pour le recueil des renseignements relatifs à la
défense et à la promotion des intérêts
fondamentaux de la Nation suivants :
L'indépendance
nationale, l'intégrité du territoire et la
défense nationale ;
Les intérêts
majeurs de la politique étrangère,
l'exécution des engagements européens et
internationaux de la France et la prévention de
toute forme d'ingérence étrangère ;
Les intérêts
économiques, industriels et scientifiques majeurs
de la France ;
La prévention
du terrorisme ;
La prévention
:
a) Des atteintes à la forme républicaine
des institutions ;
b) Des actions tendant au maintien ou à la
reconstitution de groupements dissous en application de
l'article L. 212-1;
c) Des violences collectives de nature à porter
gravement atteinte à la paix publique ;
d) La prévention de la criminalité et de
la délinquance organisées ;
6.
La prévention de la prolifération
des armes de destruction massive".
La notion de
destruction massive dans la règlementation des biens à
double usage
Vu la résolution
1740 (2004) du Conseil de Sécurité des Nations
Unies, et vu d'autre part les considérants
introductifs du règlement n° 428/2009 modifié
du Conseil Européen cité ci-dessus, ainsi que
ses articles et son annexe I, les armes de destruction
massive sont exclusivement les armes nucléaires,
chimiques, biologiques, et leurs vecteurs.
Contrairement à
la règlementation américaine qui ajoute des
biens utilisables à des fins malveillantes aux listes
établies par les instances intergouvernementales, la
règlementation européenne ne vise pas biens à
usage civil susceptibles d'être détournés
à des fins terroristes. Les attentats des dernières
décennies évoquées ci-dessus ont certes
produit des dégâts humains très
importants, mais le nombre des victimes est resté
limité à quelques centaines de morts et de
blessés.
Par destruction massive,
il faut entendre des destructions équivalentes à
celles de la première guerre mondiale résultant
de tirs continus d'obus conventionnels et chimiques envoyés
par des batteries d'artillerie ; ou des ravages causés
lors de la seconde guerre mondiale où des villes
entières ont été détruites et des
dizaines de milliers d'habitants ont été tués
par des raids de bombardiers allemands en France, en
Angleterre, en Pologne, en Russie et ailleurs ; de même
que par des raids de bombardiers japonais et américains
en extrême orient , et des bombardiers américains
et anglais en France et en Allemagne.
De
véritables destructions massives eurent eu lieu vers
la fin de la guerre où les allemands ont envoyé
en Angleterre des milliers de bombardiers sans pilote (V1),
qui étaient les premiers missiles de croisière ;
puis des milliers de fusées guidées par des
moyens inertiels (V2). Ces bombardements ont causé des
dégâts massifs sur les villes anglaises. Le pire
s'est produit 1945 avec le largage de bombes nucléaires
sur Hiroshima et Nagasaki qui ont causé immédiatement
des dizaines de milliers de morts par la boule de feu, la
rayonnement gamma, l'onde de choc et l'effet de souffle ;
et sans doute des centaines de milliers à long terme
par les brûlures et les maladies produites par la
radioactivité.
Des anéantissements
de populations ont continué au cours des multiples
conflits locaux : au Vietnam où l'aviation
américaine a déversé des milliers de
tonnes de bombes conventionnelles, incendaires et
défoliantes ; sur le front Iran-Irak ces deux
belligérants ont utilisé autant d'ypérite
que ceux de la première guerre mondiale ; au
Kurdistan irakien où les habitants d'une vallée
entière ont été éliminés
par des gaz de combat ; en Afghanistan ; en Syrie
... etc.
L'annexe
I listant les biens à double usage a été
modifiée une deuxième fois par le règlement
délégué (UE) n°1382/2014 de la
Commission du 22 octobre 2014, avec effet à compter du
31 décembre 2014. Cette liste correspond aux
« éléments
connexes »
à ces armes de destruction massive cités au
considérant introductif n° 15 du règlement
n° 428/2009 modifié.
Les armes nucléaires
La bombe d'Hiroshima a
été larguée par un bombardier
quadrimoteurs B29 volant à très haute altitude
et a produit une explosion d'une puissance de l'ordre de 20
kilotonnes de trinitotoluène (TNT), c'est à
dire une puissance équivalente à celle de
l'explosion de 700 méga-camions chargés chacun
de 30 tonnes de TNT .
Celle
de Nagasaki, de puissance équivalente, mais
de conception différente et
encore
très lourde, a également été
larguée
à
très haute altitude pour
que
l'avion puisse
s'éloigner rapidement du lieu de l'explosion.
Les
bombes actuelles sont des armes thermonucléaires
encore
plus puissantes mais dont la taille et la poids peuvent être
équivalents à ceux d'un obus.
Toutefois,
n'ayant jamais réalisé d'essais nucléaires,
les
"états proliférants" ou les grandes
organisations terroristes ne peuvent en aucun cas disposer
d'armes nucléaires ainsi miniaturisées
susceptibles d'être emportées par un avion civil
dont la vitesse, l'altitude et la charge utile sont limitées,
ou même par un missile SCUD. En revanche, on peut
toujours craindre l'acheminement par conteneur maritime ou
par camion d'un engin nucléaire de 10 à 30
tonnes qui stationnerait près d'une grande ville avant
d'exploser
Pour cela il faudrait
que l'état ou l'organisme terroriste puisse se
procurer quelques kilogrammes de plutonium 239 (métallique
et très pur), de l'acier à très haute
résistance mécanique, des machines outils
spéciales, des explosifs d'amorçage, du carbure
de tungstène, du béryllium, une source de
neutrons, des dispositifs électroniques d'allumage
synchronisé, des éclateurs électriques
... etc. Cela paraît impensable, mais il existe
peut-être une réelle volonté malveillante
de se procurer tous ces constituants clandestinement dans nos
pays européens afin de réaliser un attentat
nucléaire.
Les armes chimiques
L'arme chimique est
terrifiante mais elle est beaucoup moins efficace que l'arme
nucléaire car elle nécessite l'envoi de
milliers de bombes ou d'obus sur une zone urbaine pour
obtenir des destructions massives équivalentes à
celles d'une arme nucléaire.
L'ypérite a été
massivement utilisée au cours de la première
guerre mondiale et du conflit Iran/Irak. Ce toxique de guerre
est assez facile à fabriquer par un état
disposant d'équipements résistant à la
corrosion du chlorure d'hydrogène (HCl). Employé
à l'état liquide mais très volatil, il
peut être emmené par avion capable d'en emporter
des centaines de litres, et être déversé
à la manière d'un épandage de pesticides
agricoles, si le pilote a la possibilité se protéger
contre la toxicité de ce "gaz de combat" .
Les
produits neurotoxiques, tels que le sarin, le soman, qui
nécessitent des quantités moindres à
emporter, sont beaucoup plus meurtriers, mais ils
présenteraient un danger encore plus grand pour le
pilote s'ils étaient répandus par avion. De
plus, ils sont très difficiles à fabriquer en
raison de leur instabilité dans le temps. Les
inspections des Nations Unies (UNSCOM) faites au cours des
années 90 ont montré en effet que l'Irak avait
mis en oeuvre des procédés de fabrication
allemande datant des années 40 et que le sarin contenu
dans les stocks d'obus datant de quelques années
s'était entièrement décomposé. Ce
risque est peut être improbable, mais il n'est pas nul
Le
paragraphe 9A350 de la liste des biens à double usage
vise ainsi les systèmes de pulvérisation ou de
nébulisation, spécialement conçus ou
modifiés pour équiper des aéronefs, des
véhicules plus légers que l'air ou des
véhicules aériens sans équipage, ainsi
que leurs composants spécialement conçus ;
à savoir des unités de génération
d'aérosols capables de disperser de très fines
gouttelettes à grand débit à partir de
produits liquides.
Autrement dit, les
rampes de pulvérisation fixées sous les
hélicoptéres ou les avions d'épandage
agricole de type Piper PA-25, et munis d'une douzaine
d'atomiseurs Micronair AU5000 et AU7000 sont susceptibles
d'être interdites ou soumises à autorisation à
l'exportation.
Les armes biologiques
La
Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la
fabrication et du stockage des armes bactériologiques
(biologiques) ou à toxines, mise à la signature
par l'organisation des Nations Unies le 10 avril 1972 est
entrée en vigueur en 1975. Elle compte actuellement
163 Etats parties. Cette convention interdit la mise au
point, la fabrication, le stockage et la transmission des
armes biologiques, et impose à ses membres la
destruction de leurs stocks éventuels ou une
utilisation pacifique de ces derniers. Elle n'interdit pas
directement l'utilisation des « armes
biologiques », mais se réfère au
Protocole de Genève de 1925 qui rend cette
interdiction contraignante en vertu du droit international
public.
Certains pays non
signataires de cette convention ont cherché (ou
cherchent encore) à réaliser ce genre d'arme en
essayant de produire massivement des micro-organismes
pathogènes pour en extraire les toxines
correspondantes. Les toxines sont les produits non vivants,
ultra-toxiques, secrétés par ces germes
pathogènes ; ces produits chimiques d'origine
biologique ne présentent pas l'inconvénient de
se reproduire, de se multiplier et ainsi de provoquer des
pandémies non maîtrisables, comme pourraient
l'être leurs germes pathogènes producteurs.
Les technologies de
fabrication sont les mêmes que celles de fabrication
des vaccins qui nécessitent la manipulation sous
scaphandres de germes pathogènes en laboratoires de
très haute protection P4, équipés des
matériels spécialement adaptés,
d'ailleurs soumis à contrôle comme biens à
double usage.
En ce qui concerne les
fusées balistiques Scud A, dérivées du
V2 allemand, et produites dans les années 50 par l'ex
URSS sous le nom de SS-1b, leur charge utile était de
quelques centaines de kilogrammes avec une portée de
130 km.
Le Scud B (SS-1c), d'une
charge utile de 1000 kg, d'une portée de 300 km et
d'une précisison de 900 m a ensuite été
produit en ex-URSS à des milliers d'exemplaires, puis
il a été copié sous différents
noms par de nombreux pays et massivement utilisé par
les deux belligérants au cours de la guerre Iran/Irak
en emportant notamment de l'ypérite ou du sarin.
Les versions ultérieures
de ce missile balistique ont été améliorées.
En effet, les Scud C et D, qui ont fait l'objet d'une large
prolifération, ont maintenant des charges utiles de
plus d'une tonne, une portée de plusieurs centaines de
kilomètres avec des précisions respectives de
900 m et de 50 m.
Quant aux missiles plus
récents produits par les grandes puissances
nucléaires, ils ont depuis longtemps une portée
intercontinentale et peuvent délivrer des charges
multiples à des précisions de l'ordre du mètre.
Des informations sur le
guidage des missiles ont été communiquées
dans la version la plus récente de la Militarily
Technology Critical List (MCTL) publiée en 1998 par le
Department of Defence américain. Par exemple, en ce
qui concerne les systèmes de navigation par inertie,
les autorités militaires américaines expliquent
ceci :
An inertial navigation system (INS) is a
self-contained, covert navigation system that provides
continuous estimates of some or all components of a
vehicle state, such as position, velocity, acceleration,
attitude, angular rate, and often guidance or steering
inputs.
The INS is made from
a navigation computer and a set of gyroscopes and
accelerometers, generally called inertial sensors that
measure in Newton's inertial axes. Gyroscopes
measure rotation or angular rate, and accelerometers
measure acceleration. Integrating the output from an
accelerometer gives speed, and integrating speed
gives distance traveled. The gyroscopes provide
information on where the accelerations are directed, and
therefore heading and distance, the essential ingredients
for dead reckoning, are known.
The inertial sensors might be mounted in a set of
gimbals so that they (1) stay level in a fixed direction
no matter how the vehicle moves, i.e., space stable INS;
or (2) remains parallel to the reference ellipsoid, i.e.,
a local level INS. Both of these are called a gimbaled
system. As an alternative, the inertial sensors might be
attached to the vehicle, in which case they measure its
motion components in the vehicle axes by transforming the
measurements from the vehicle axes to the reference axes.
This is called a strapdown system.
Inertial measurement equipment includes the inertial
navigation unit, inertial measurement unit, inertial
reference unit, inertial sensor assembly, or inertial
sensor unit are subassemblies of an inertial navigation
system; a self-contained, covert system that provides
continuous estimates of some or all components of a
vehicle state, such as position, velocity, acceleration,
attitude, angular rate, and often guidance or steering
inputs. It also includes an Attitude Heading Reference
System (AHRS) or Gyrocompass that provides attitude and
magnetic heading, but does not provide a complete
navigation solution. An AHRS or Gyrocompass may provide
velocity, angular rate, and acceleration data in addition
to attitude and heading. This system may be combined into
hybrid systems to complete the navigation function.
C'est
ainsi que les composants, accessoires et systèmes de
guidage missiles relèvent de la réglementation
des biens à double usage. Ceux-ci figurent dans
l'annexe jointe au présent rapport reproduisant les
paragraphes pertinents des chapitres 7 et 9 de la liste des
biens à double usage.
-
Les
drones (UAV et UCAV)
Les
mêmes technologies de guidage peuvent être
utilisées pour des « drones ».
En
effet, la définition générale de
« missile » donnée par
l'arrangement de Wassenaar et reprise dans la liste des biens
à double usage,
intègre les
"systèmes
de véhicules aériens sans équipage,
dont
la portée est au moins égale à 300 km et
capables d'emporter une charge utile de 500 kg".
Le
paragraphe 9A110 résultant de la transposition de la
définition du MTCR reprend indique une même
portée minimum de 300 km, mais ne précise pas
de seuil de charge utile.
Un
document du Parlement européen datant de 2007 intitulé
« UAVs
and UCAVs : Developments in the European Union »,
dont un extrait est
reproduit ci-dessous, fait le point sur ces engins et
distingue les UCAV porteurs d'une bombe et les UAV servant
essentiellement à l'observation :
2.3 UCAV
A UCAV is a
sub-category of UAVs. It is basically nothing more than
an armed UAV. The border between UAV and UCAV is a thin
and grey one. Generally, all UAVs have an inherent combat
capacity – one just has to replace a non-deadly
payload with a deadly one. The US Predator was modified
from a reconnaissance UAV to a UCAV by simply adding
Hellfire missiles.
UCAVs have
evolved, experimentally, when normal aircraft have been
modified to operate without a pilot. Iraq is reported to
have modified L-29 trainer aircraft into
remote-controlled chemical weapon sprayers.
The term UCAV,
however, is generally used for a high-performance
vehicle, capable of high speed, long range and heavy
weapon load – more or less the equivalent of a
manned ground-attack or bomber aircraft. The armed
Predator, therefore, would not really count as a UCAV,
while the Iraqi L-29 modification would be a borderline
case.
The first
successful use of armed UAVs in combat operations was the
attacks carried out by the US against ‘terrorist'
targets in Yemen and Afghanistan in 2002 and 2003. These
attacks were carried out with Predator (MQ-9)8
reconnaissance UAVs modified to carry one or two Hellfire
missiles9. The use of armed UAVs resulted from the
failure of the US to ‘take out' terrorists,
and specifically Osama bin Laden, with cruise missiles.
While the cruise missiles worked more or less as
advertised, the time lag between identifying a mobile
target such as Bin Laden and the actual impact of the
missiles was too great.
Ruling out the
use of manned reconnaissance and attack systems, the only
solution was to combine the detection and surveillance
capabilities of a UAV with a weapon. This could either be
done by relaying surveillance data to a platform carrying
weapons or by adding weapons to the surveillance system.
The first option has already been used by Israel in
actions against targets in Gaza and Lebanon: UAVs would
patrol and identify targets and manned aircraft would
fire stand-off guided missiles to attack the target.
Since the platform (usually an aircraft) carrying the
missile was further away from the target than the UAV,
there still remained a gap between target identification
and the missile hitting. It also meant that a manned
platform would have to be within missile range of the
target.
The US, however,
chose to arm the UAV itself, thereby further closing the
gap between target identification and a missile hitting
it, and providing the option to do all this from a
distance of up to several hundred kilometres. Adapting a
rather large UAV, such as the Predator, to carry a light
armament did not prove too difficult. The Predator was
modified, tested and brought into action within months.
It gave the US new options to identify and attack
time-sensitive targets without having to risk manned
aircraft over ‘enemy' territory or in
politically sensitive airspace. The armed Predator proved
so successful that a new version was ordered almost at
once. This much improved version - Predator-B (MQ-9B) -
is now being acquired, capable of carrying up to 450 kg
of missiles or bombs aswell
as air-to-air missiles to defend itself against
interception. This new Predator has an endurance of
almost two days.
Les pilotes de ces
« bombes volantes » doivent guider
leurs engins par tous temps, corriger leurs vitesse, opérer
des changements de direction en cas de menace sur un
territoire adverse, maîtriser leur altitude au dessus
du relief … etc.
La télécommande
par radio nécessite des moyens de cryptage
sophistiqués des données de vol, et de
transmission impossibles à détecter (par
exemple par des technologies d'étalement de spectre),
pour que ni l'engin ni le pilote ne soient localisés
par l'adversaire. Aussi, avant de transmettre ses données
au pilote sur le sol terrestre, pour qu'il puisse vérifier
la trajectoire de leurs UCAV ou la faire changer, ceux-ci
doivent se repérer eux-mêmes automatiquement
dans l'espace aérien par une coordination de plusieurs
moyens de posittionnement.
Pour affiner la
précision de la frappe aérienne, les systèmes
de navigation inertielle doivent être combinés à
des corrections de vitesse, à des contrôles
d'attitude de référence par triangulation en
visant trois étoiles servant de référence
au moyen de gyro-astro-compas, à des repérage
du nord magnétique par des magnétomètres,
à des suivis de positionnement par GPS différentiel
(en se positionnant par rapport un point immobile tel qu'un
hélicoptère), associé à la
cartographie du terrain en trois dimensions, à une
coordination par des horloges ultra précises …
etc.
Les UCAV doivent être
furtifs (au moyen de peintures spéciales), voler à
très basse altitude et suivre le relief. Ils doivent
être capables de changer brutalement d'altitude ou de
direction suivant des rayons de courbure très courts
pour éviter les avions de chasse adverses qui ne
peuvent pas virer ou changer d'altitude aussi vite, ce qui
provoque des accélérations de 10 à 20
fois celle de la pesanteur, voire plus, obligeant les organes
mécaniques et l'électronique à résister
à la déformation et à l'écrasement,
et les ailes à résister à la rupture.
Les UCAV peuvent être
autonomes (volant sans l'aide d'un pilote à terre) et
préprogrammées mais, contrairement aux missiles
ballistiques dont la trajectoire dévie peu, ces bombes
volantes dévient continuellement de leur trajectoire
en subissant les intempéries et doivent la corriger
immédiatement par leur ordinateur de bord gérant
les données de leurs capteurs. Il s'agit alors de
missiles de croisière dont la conception est
parfaitement sophistiquée.
-
Les "aéronefs"
Il s'agit des avions et
des hélicoptères pilotés. On a vu
récemment à la télévision des
hélicoptères de l'armée régulière
syrienne détruire des quartiers entiers de la ville
d'Alep en la bombardant verticalement avec des hélicoptères
immobilisés en vol stationnaire à quelques
centaines de mètres d'altitude. On comprend le
contrôle des exportations de tous les hélicoptères
par l'arrêté du 31 juillet 2014 en application
du règlement n° 428/2009 modifié, pour des
raisons de contrôle de prolifération des
vecteurs d'armes de destruction massive, car les charges
explosives peuvent aussi être chimiques et déposées
avec précision.
En revanche, sauf en cas
d'emploi d'avions suicides disposant d'une assistance au
pilotage par des systèmes de navigation relevant de la
réglementation des biens à double usage, ou de
détournement d'avions d'épandage de pesticides
agricoles, l'interdiction d'exportation des avions civils par
la « clause attrape-tout », n'est pas
justifiée.
Les avions normaux ne
sont pas conçus pour larguer une charge de dizaines ou
de centaines de kilogrammes en piqué sur une cible
précise comme l'étaient les bombardiers
monomoteurs en piqué au
cours de la seconde guerre mondiale (Stukas alllemands, AT6
américains, Zeros japonais ....). Ces
anciens avions disposaient de systèmes de basculement
de la bombe pour éviter qu'elle ne touche l'hélice
au moment de son largage et possédaient des blindages
pour éviter les tirs d'armes légères à
basse altitude.
Ils
étaient aussi très robustes pour pouvoir
résister à la très forte accélération
pesant sur la structure et sur les ailes en remontant
brutalement pour reprendre de l'altitude, mais
ils sont très vite
devenus obsolètes car ils
étaient moins rapides et moins maniables que les
chasseurs qui les éliminaient, d'autant
que, dès la fin de la guerre, sont apparus des
chasseurs à réaction capables d'éliminer
tout avion à hélice.
Les
mesures restrictives à l'exportation vis à vis
des règles de l'OMC et de l'OMD
Compatibilité
avec le droit international
De par leur nature ambivalente, les biens à double
usage relèvent tout d'abord du droit commercial. En
effet, leur usage initial est présupposé civil.
Dès lors on considère le contrôle de ces
biens comme relevant en partie des règles du commerce
international. Toutefois, en raison des risques sécuritaires
et stratégiques qu'ils représentent, une
entorse à ces principes reste possible, quand elle
n'est pas tout simplement prévue.
L'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) est
une organisation internationale dont la France est membre
depuis sa création au 1er janvier 1995, au même
titre que 159 autres Etats. L'OMC vise à régir
le commerce international entre les pays. Son but principal
est de favoriser l'ouverture commerciale en réduisant
les obstacles au libre-échange. L'OMC s'inscrit en
effet dans la continuité du General Agreement on
Tariffs and Trade (GATT), qui, dès 1948, a posé
les bases du droit international économique dans
l'objectif de réduire les restrictions au commerce
international.
l'Organisation Mondiale des Douanes (OMD), qui compte
179 membres, prône une ouverture des marchés et
une facilitation des échanges internationaux à
travers des normes internationales ou la coopération
entre administrations douanières. L'OMD s'assure en
effet de la réalisation technique des objectifs
généraux de l'OMC à travers un travail
d'harmonisation normative et logistique. Mais elle identifie
aussi le renforcement de la sécurité des
chaînes logistiques internationales comme vecteur de
facilitation de ces échanges. Or une plus grande
sécurité de celles-ci induit un contrôle
accru et, par extension, des restrictions à certains
flux.
Ainsi le contrôle et les restrictions à
l'exportation des biens à double usage semblent
s'inscrire en contradiction avec les principes fondamentaux
du droit international économique. Toutefois, ces
accords ont prévu des mesures dérogatoires pour
certaines catégories de biens. Les commerces des biens
culturels, des armes ou des biens à double usage sont
autant de catégories qui sont soumises à des
contrôles pouvant représenter une barrière
au commerce international. Le GATT prévoit cette
éventualité par des dispositions dérogatoires,
à ses articles XX et XXI, pour les Etats membres
souhaitant se soustraire aux principes de libre commerce.
Cependant, ces dérogations sont soumises à
conditions. Ainsi, elles ne doivent pas être appliquées
«de façon à constituer soit un moyen
de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays
où les mêmes conditions existent, soit une
restriction déguisée au commerce
international». Par ailleurs, le champ de ces
exceptions est défini : protection de la santé
et de la vie des personnes et des animaux, exportation de
l'or ou de l'argent (article XX) ou encore en matière
de sécurité (article XXI). C'est cette
dérogation qui fonde les principes légaux du
contrôle international des biens à double usage:
Aucune
disposition du présent Accord ne sera interprétée
:
b)
comme empêchant une partie contractante de prendre
toutes mesures qu'elle estimera nécessaires
à la protection des intérêts
essentiels de sa sécurité :
i) se rapportant aux matières
fissiles ou aux matières qui servent à
leur fabrication ;
ii) se rapportant au trafic d'armes,
de munitions et de matériel de guerre et à
tout commerce d'autres articles et matériel
destinés directement ou indirectement à
assurer l'approvisionnement des forces armées
;
C'est donc l'article XXI b) ii) qui fonde la base légale
du contrôle des biens à double usage en
autorisant tout pays membres de l'OMC à exercer un
contrôle dérogeant aux principes fondamentaux de
libre échange sur les biens destinés
directement mais aussi indirectement à des fins
militaires. Le contrôle de ces exportations ne consiste
donc pas à une véritable entorse aux principes
de libre échange mais à une nécessaire
adaptation à des impératifs stratégiques.
En effet, si le libre-échange est un des principes
centraux des relations internationales, il n'en
constitue pas la clef de voûte. Les intérêts
sécuritaires, stratégiques et de défense
des Etats, mais aussi de la communauté internationale,
priment sur la pure et simple libre circulation des
marchandises. Par ailleurs, comme on le verra par la suite,
la stricte interdiction des exportations reste l'exception
dans le contrôle des biens à double usage.
Ainsi, ces flux ne sont pas interdits mais encadrés et
contrôlés, ce n'est donc pas une
dérogation totale aux principes de libre échange
en méconnaissance des enjeux commerciaux et
industriels mais un cadrage pour motifs impérieux de
sécurité internationale dont l'ONU,
notamment, a défini les contours.
L'ONU
et le cadre général du contrôle des biens
à double usage
Si les principes juridiques commerciaux desquels relève
le contrôle des biens à double usage ont été
abordés, il s'agit désormais de se pencher sur
la dimension seconde de ces biens et l'aspect sécuritaire
de leur contrôle. Ainsi, l'Organisation des Nations
Unies (ONU) a souhaité poser les bases du volet
sécuritaire de ce contrôle.
En effet, le maintien de la paix et de la sécurité
internationale est une mission du conseil de sécurité,
dont la France est un membre permanent depuis sa création
en 1945, à la suite de la conférence de San
Francisco. Les décisions prises par le conseil de
sécurité doivent être acceptées et
appliquées par les Etats membres (article 25 de la
Charte ONU), ce qui en fait des outils d'harmonisation
précieux aux yeux de l'ONU. C'est plus
particulièrement le Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies et la résolution 1540 du 28 avril 2004,
prise par le Conseil de Sécurité, qui entendent
instituer un contrôle des biens à double usage
au niveau mondial. Toutefois il apparaît que ce régime
général de contrôle n'est pas
forcément le cadre d'action le plus efficace.
Le contrôle pour motifs sécuritaires des
exportations de biens à double usage relève
d'une volonté diplomatique et politique des Etats
exprimée à travers le conseil de sécurité
et l'ONU. Le chapitre VII de la charte des Nations Unies,
intitulé « Action en cas de menace contre la
paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression
», prévoit, à son article 39, que si
le conseil constate «l'existence d'une menace contre
la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression»,
il peut décider «quelles mesures seront
prises conformément aux articles 41 et 42 pour
maintenir ou rétablir la paix et la sécurité
internationale». Ainsi, l'article 41 prévoit
que des mesures n'impliquant par le recours à la force
peuvent être prises par le Conseil de Sécurité.
Ces mesures peuvent constituer à inviter les Etats
membres à «l'interruption complète ou
partielle des relations économiques» avec
l'Etat visé par ces sanctions, c'est-à-dire des
embargos. Dès lors les Etats peuvent être
amenés, sur décision du conseil de sécurité,
à contrôler voir interdire les exportations de
biens sensibles, tels que les biens à double usage,
vers des destinations dites à risques.
Les Etats identifient des pays jugés à risques
et décident de contrôler les exportations des
biens sensibles vers ces pays dans le cadre d'embargos.
L'exemple des résolutions du Conseil de Sécurité
visant l'Iran depuis 2006 illustre l'usage fait par l'ONU de
l'article 41 chapitre VII de la charte pour contrôler
ces biens. Ainsi la résolution 1737 (2006)9 interdit
«la fourniture, la vente ou le transfert, directs ou
indirects […] de tous articles, matières,
équipements, biens et technologies […]
susceptibles de contribuer aux activités liées
à l'enrichissement, au retraitement ou à
l'eau lourde, ou à la mise au point de vecteurs
d'armes nucléaires ». Cette volonté
est par la suite réaffirmée par la résolution
1803 (2008) qui complète la résolution 1737 en
plaçant sous embargo les biens à double usage
énumérés par une circulaire (mise à
jour en 2010) à laquelle l'article 13 de la résolution
1803 fait référence. Le conseil de sécurité
a donc jugé nécessaire d'encadrer strictement
le commerce des biens à double usage au même
titre que celui des armes conventionnelles. La résolution
1929 (2010) est dernièrement venue étoffer cet
arsenal de restrictions en ajoutant aux biens à double
usage les transferts de technologie dans les secteurs
sensibles, la fourniture de services financiers, «notamment
les services d'assurance et de réassurance »,
ou le transfert «de tous fonds, autres actifs ou
ressources économiques [qui] pourraient contribuer aux
activités nucléaires de l'Iran ».
De plus, la résolution instaure un contrôle
strict des biens listés par les résolutions
1737 et 1803, en autorisant, à son article 16, les
Etats membres à s'en saisir et à procéder
à leur neutralisation au cours d'inspections
réalisées, elles, en vertu des législations
nationales (article 14). Dernièrement, ce contrôle
a été remis en cause, bien que maintenu, dans
le cadre des négociations autour du nucléaire
iranien. Si la France semblait très réticente à
l'assouplissement de ce contrôle, il est apparu
que ces sanctions étaient potentiellement discutables,
notamment pour les Etats-Unis. En effet, la dernière
réunion de mars 2015 à Lausanne a laissé
présager une avancée sur la levée des
sanctions.
Ainsi, à travers ces résolutions et l'exemple
de l'embargo iranien, il apparaît que le contrôle
international des biens à double usage relève
tout d'abord d'une volonté politique et sécuritaire
et s'applique en priorité à des zones ciblées
et jugées à risque. La mise en place d'une
régulation ad hoc est ici nécessaire pour
encadrer les transferts de ces biens vers l'Iran et une liste
exhaustive de biens est dressée pour l'application de
ces textes. On n'est donc pas face à une régulation
internationale de droit commun des biens à double
usage mais à des mesures ponctuelles et spécifiques
d'embargo dans le cadre de négociations diplomatiques
et liées au contexte géostratégique.
La résolution 1540, adoptée le 28 avril 2004
par le Conseil de Sécurité de l'ONU, en vertu
du chapitre VII, est un texte juridiquement contraignant.
Elle vise, dans un contexte post 11 septembre 2001, à
renforcer la lutte contre «la prolifération
des armes nucléaires, biologiques, chimiques et leurs
vecteurs, et le risque lié à l'acquisition
de ces armes par des acteurs non étatiques».
La résolution 1540 est une réponse aux
inquiétudes, qui surgissent à la chute de
l'URSS et à la suite du 11 septembre 2001, de voir de
nouveaux acteurs non-étatiques constituer une menace
jusqu'alors mal prise en considération par les
traités «classiques» de non-prolifération.
Cette résolution prône ainsi la
non-prolifération, le multilatéralisme et la
coopération pour lutter efficacement contre les
nouvelles menaces identifiées. Ceci marque, à
l'époque, un revirement de la politique diplomatique
américaine. Dans un objectif d'efficience, elle engage
un renforcement du volet coercitif et répressif en
complément des actions majoritairement préventives
des précédents traités de
non-prolifération. Ainsi, le Conseil de Sécurité
«décide» que les Etats ont obligation de
«prendre et appliquer des mesures efficaces afin de
mettre en place des dispositifs intérieurs de contrôle
destinés à prévenir la prolifération
des armes nucléaires, chimiques ou biologiques et de
leurs vecteurs, y compris en mettant en place des dispositifs
de contrôle appropriés pour les matières
connexes». L'emploi du terme « matières
connexes », sans références à
une liste exhaustive de biens ou de matériels, laisse
donc un champ large d'interprétation et de contrôle
qui permet d'y inclure les biens à double usage.
Ce texte marque un retour vers un régime multilatéral
et à vocation contraignante du contrôle du
commerce des biens «sensibles».
Toutefois, que ce soient par les résolutions 1737,
1803 ou 1929 dans le cas iranien, ou la résolution
1540 qui instaure un régime général de
contrôle, l'ONU ne fait que poser les bases du
contrôle. Celui-ci relève en dernier ressort du
droit interne des Etats et son efficience dépend en
grande partie de sa transposition en droit interne. C'est
d'ailleurs pour cette raison que la résolution 1540
portait création du Comité 1540, au sein du
Conseil de Sécurité, chargé de contrôler
et d'assister les Etats dans la mise en oeuvre des
obligations découlant du texte18.
Les textes internationaux posent donc des cadres de contrôle
généraux qui permettent une harmonisation des
normes de contrôle, notamment à l'aide d'organe
tel que le Comité 1540, mais restent subordonnés
à la transposition en droit interne de ces normes et à
la réalisation d'un contrôle dépendant
exclusivement des Etats. C'est pourquoi certains Etats ont
jugé nécessaire de s'entendre sur des normes de
contrôle communes plus précises. C'est
dans cette optique qu'ont été créés
les différents régimes multilatéraux de
contrôles des exportations (RMCE), dont l'Arrangement
de Wassenaar.
L'Union Européenne est un acteur central dans la
mise en place de ce contrôle. La majorité de ses
membres sont, aujourd'hui, parties de l'arrangement
de Wassenaar et étaient représentés au
COCOM. Par ailleurs, une grande partie des principaux pays
exportateurs sont membres de l'Union Européenne
(France, Allemagne, Belgique, Autriche, Italie…).
C'est donc assez naturellement que cet enjeu a
finalement pris des dimensions communautaires. En effet, la
mise en place de régimes internationaux présente
des avantages particuliers qui se montrent toutefois limités.
L'adoption d'une base commune de contrôle
et d'une définition partagée du champ de
contrôle est nécessaire à la mise en
place d'un cadre effectif de régulation.
Toutefois, il s'avère que cette harmonisation
peut se révéler insuffisante, particulièrement
au sein d'une Union douanière telle que l'Union
Européenne. La libre circulation des marchandises,
consacrée par l'article 28 du Traité sur
le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE),
ex-article 23 TCE, nécessite une coordination poussée
en matière d'encadrement des biens à
double usage. Sans normes spécifiques communes, la
non-participation d'un seul Etat membre aux régimes
de contrôle précités rendrait les efforts
des autres pays membres inutiles. C'est donc la
compétence exclusive de la Commission en matière
douanière et commerciale (article 3.1 TFUE), qui a
fait des politiques en matière d'exportations un
enjeu communautaire. Néanmoins, ce contrôle n'a
pas été évident à instaurer. Dès
1994 et la fin du COCOM, l'UE avait tenté
d'instaurer un régime commun de contrôle.
En effet, l'ouverture des frontières européennes
le 1er janvier 1993 supposait l'adoption d'un
régime commun et spécifique. Mais celui-ci
avait d'abord échoué du fait d'un
équilibre précaire entre les objectifs de
sécurité et de compétitivité. Car
si l'UE est compétente en matière
commerciale, ses prérogatives sécuritaires
sont, elles, plus incertaines. Or les biens à double
usage s'inscrivent à la croisée de ces
deux enjeux. De ce fait, la dimension « trans-piliers »
d'un tel contrôle, reposant sur des fondements
commerciaux et sécuritaires, avait été
jugée contraire au droit communautaire par la CJCE.
Cependant, l'UE a mis en place un système de
contrôle dès les années 2000, en
refondant son action sur des bases légales conformes à
la jurisprudence communautaire, sans abandonner la dimension
sécuritaire et politique à travers le cadre
fixé par le Conseil.
Le contrôle des exportations de biens à
double usage
en Union européenne
La base du cadre de contrôle européen en matière
de biens à double usage a d'abord était
incertaine. C'est la nature ambivalente des biens
contrôlés et la dualité des motifs de
réglementation qui avaient initialement posé
problème à la Cour. L'UE, et a fortiori
la Commission, n'ayant aucune compétence
normative formelle en matière de défense et de
politique étrangère, celle-ci restant
l'exclusivité des Etats membres, le cadre de
contrôle a dû être refondu sur des bases
légales stables. C'est donc en se basant sur les
prérogatives de l'Union en matière
commerciale, dans une logique fonctionnaliste, que ce
contrôle a été élaboré,
sans toutefois abandonner sa dimension diplomatique et
sécuritaire, comme on le verra notamment à
travers l'exemple russe.
-
Une compétence exclusive en matière
d'exportations
L'Union Européenne, avant d'être un espace
politique ou citoyen commun, est un espace économique
intégré ayant rassemblé des pays
européens autour de politiques commerciales et
douanières communes. La Communauté Européenne
du Charbon et de l'Acier (CECA), en 1951, et la Communauté
Économique Européenne (CEE), en 1957, ont posé
les bases de ce territoire commercial et douanier commun. La
suppression des droits de douanes, la mise en place de tarifs
douaniers communs avec les pays tiers et la quasi-exclusivité
en matière commerciale de la commission ont fait de
l'UE un acteur incontournable en matière de politiques
économiques et commerciales extérieures. Le
Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne
(TFUE) de 2007 confère en effet une compétence
exclusive à l'Union en matière douanière
(article 3.1 a) et commerciale (article 3.1 e)). C'est
pourquoi, au moment de s'intéresser à la
réglementation communautaire en matière
d'exportation, il paraît nécessaire de poser le
cadre institutionnel qui le précède. En effet,
le TFUE, à son article 207 alinéa 2 (ex-art.133
TCE), rappelle que la commission et le conseil sont
compétents pour adopter les mesures «
définissant le cadre dans lequel est mise en oeuvre
la politique commerciale commune » par voie de
règlement. Cet article est la première base
légale des règlements communautaires qui
encadrent le contrôle des biens à double usage.
Les institutions de l'Union sont donc compétentes
pour légiférer et encadrer la politique
commerciale communautaire. Ainsi le règlement (CEE)
n°2603/69 du Conseil du 20 décembre 1969, portant
établissement d'un régime commun applicable aux
exportations, fixe le cadre de ce régime commercial
commun et fonde l'un des trois piliers originels de
l'actuelle Union Européenne. C'est d'ailleurs dans le
respect de ce texte que le règlement (CE) n°428/2009
du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime
communautaire de contrôle des exportations, des
transferts, du courtage et du transit de biens à
double usage enjoint les Etats à prendre des mesures
sur les exportations de biens à double usage
(considérant 5 du règlement). C'est bien la
réglementation communautaire en matière
commerciale qui cadre le contrôle des biens à
double usage. Par ailleurs, le futur code des douanes de
l'union, établi par le règlement communautaire
n°450/2008 du 23 avril 2008, participera à la mise
en place d'un territoire douanier unifié dans la
lignée du premier code communautaire de 1992. Celui-ci
s'applique de façon uniforme à l'ensemble du
territoire de l'Union 30 et entend unifier les procédures
douanières, notamment les systèmes
électroniques avec le nouveau texte. Ce code
s'appliquant à l'ensemble des marchandises relevant
des traités communautaires, il vise donc à
encadrer et harmoniser le volet pénal sanctionnant les
infractions aux normes de contrôle des biens à
double usage. La commission européenne, notamment à
travers la direction générale fiscalité
et union douanière (TAXUD), est donc l'acteur
communautaire de référence chargée des
missions douanières. Ces missions relèvent de
trois grands axes principaux: la protection des frontières
extérieures de l'Union, le développement d'une
coopération internationale et la lutte contre les
fraudes. Or le développement de règles et de
normes sécuritaires est la plus récente des
grandes tendances à l'oeuvre dans la
reconfiguration de ces missions31. C'est donc sur les textes
destinés à faciliter le commerce entre les
membres de l'Union, mais aussi avec les pays tiers, que la
réglementation sur les exportations des biens à
double usage se fonde tout d'abord. Mais ce contrôle
repose aussi sur un volet plus sécuritaire des textes
communautaires.
-
Une politique sécuritaire commune
A son article 21, le Traité sur l'Union Européenne
(1992) liste les objectifs de l'action extérieure de
l'UE. Parmi ceux-ci, on retrouve à l'alinéa 2
c), la préservation de la paix, la prévention
des conflits et le renforcement de la sécurité
internationale. Par ailleurs, à son article 24 alinéa
1, il dispose que «la politique étrangère
et de sécurité commune est soumise à des
règles et procédures spécifiques. Elle
est définie et mise en oeuvre par le Conseil
européen et le Conseil». Si les gouvernements
nationaux exercent toujours un contrôle indépendant
sur les questions de politique étrangère et de
défense, ils collaborent pour élaborer une
politique étrangère et de sécurité
commune (la PESC) et c'est le Conseil qui est le cadre
principal de cette coopération gouvernementale. Ainsi,
l'article 215 TFUE autorise le Conseil à
adopter, à la majorité qualifiée, des
mesures de restrictions commerciales sur proposition du Haut
Représentant de l'Union pour les affaires étrangères
et la politique de sécurité, et de la
Commission. L'UE s'est donc dotée de
quelques moyens d'actions diplomatiques. Cette
possibilité de sanctions s'inscrit dans la
volonté de mettre en place une ligne diplomatique
commune. Toutefois, elle reste soumise à l'accord
des Etats, à travers la compétence spécifique
du Conseil sur cette question. En effet, contrairement aux
mesures commerciales, les mesures relevant de la PESC ne sont
pas une compétence exclusive de la Commission et
restent soumises au vote des Etats membres. De ce fait, c'est
plus dans une dynamique d'harmonisation que
d'intégration que s'élabore la
ligne sécuritaire commune. A ce titre, le Conseil a
élaboré, en 2003, la stratégie de
l'Union européenne contre la prolifération
des armes de destruction massive, dite «stratégie
ADM». Dans ce document, l'UE identifie la prolifération
des armes de destruction massive, et des technologies et
connaissances à double usage, comme une menace
croissante pour la paix et la sécurité. Cette
stratégie recommande donc un renforcement du
multilatéralisme d'un contrôle basé sur
les régimes multilatéraux, tel Wassenaar. Elle
préconise par ailleurs un recours à des
sanctions dans le cadre du droit international, notamment le
Chapitre VII de l'ONU, en cas de manquements graves. Enfin,
au point 30. A) 4) du Chapitre III, elle entend «
renforcer les politiques et les pratiques en matière
de contrôle des exportations ». Cette stratégie
pose les bases politiques, plus que juridiques, du contrôle
des biens à double usage. En effet, elle est déjà
précédée par plusieurs règlements
en la matière, notamment le règlement
1334/2000, mais elle ancre ce contrôle comme une des
priorités de l'Union. Ce document fait suite au plan
d'action de Thessalonique de juin 2003 qui entendait, entre
autres, «renforcer la capacité de [l'] Union à
agir en tant que force cohérente et unifiée
dans le cadre du système international et répondre
avec efficacité aux défis que posent la
mondialisation et l'interdépendance ». Ce plan
d'action général, puis cette stratégie
spécifique, témoignent de la volonté du
conseil (organe inter- gouvernemental) d'inscrire l'aspect
sécuritaire au coeur des politiques
communautaires. Ces deux textes font office de cadre
politique à l'action de l'Union en matière
sécuritaire. Ils sont d'ailleurs évoqués
au rang de ses considérants par la Commission au
moment de rédiger les règlements encadrant le
contrôle des biens à double usage36. Si la CJCE
avait refusé, en 1997, de considérer une
politique de régulation des exportations basée
à la fois sur les compétences commerciales et
sécuritaires de l'Union, le cadre fixé
par le Conseil, à travers ces stratégies,
permet d'induire une politique de contrôle aux
bases légales commerciales et au cadre plus
diplomatique et sécuritaire. Ainsi les règlements
en matière de contrôle sont basés sur le
droit commercial européen et s'inscrivent dans
une politique sécuritaire inter-gouvernementale au
sein de l'Union. De plus, cette position commune permet
de contraindre les Etats membres à respecter leurs
engagements en les exposant à des sanctions politiques
et diplomatiques.
-
L'embargo Russe
C'est dans le cadre de cette volonté politique
que les Etats membres, à travers le Conseil, ont
décidé de mettre au point un régime de
sanctions spécifique et contraignant portant sur les
exportations communautaires à destination de la
Russie. Le règlement (UE) n°833/2014 du Conseil,
du 31 juillet 2014, concernant des mesures restrictives eu
égard aux actions de la Russie déstabilisant la
situation en Ukraine, témoigne de la prise en charge
de ces enjeux au niveau de l'Union
Ainsi, à la suite des évènements
survenus en Ukraine, l'UE a entendu mettre en place des
sanctions diplomatiques à l'encontre de la
Russie. Après avoir gelé des actifs de hauts
dignitaires russes, l'UE a adopté une batterie
de sanctions beaucoup plus restrictives. Elle a désiré
affirmer l'uniformité de sa politique
diplomatique vis-à-vis de la Russie. Plutôt que
de prendre des sanctions dans le cadre de l'ONU
(impossibles au vu du droit de veto russe), ou unilatérales,
les Etats membres ont préféré adopter
une ligne commune sous le sceau de l'UE. Le règlement
n°833/2014 est donc venu sanctionner la Russie en
interdisant les exportations communautaires de matériels
de guerre et de biens à double usage. Cet embargo a
été pris en vertu de l'article 215 TFUE
et du règlement 428/2009, qu'il s'agira de
présenter par la suite. Ainsi, l'UE, à
travers ces sanctions commerciales et sécuritaires, a
affirmé sa volonté de mettre en place une
diplomatie cohérente au niveau communautaire. Le
contrôle, voire l'interdiction, de l'exportation
des biens à double usage est donc un outil mobilisé
par l'UE dans sa politique commerciale et diplomatique.
Il est à noter que l'UE avait déjà
adopté des dispositions visant à interdire des
exportations de biens à double usage à
destination de pays jugés sensibles.
-
Les autres embargos
Les relations diplomatiques des Etats membres avec certains
pays, comme l'Iran ou la Corée du Nord, avaient
poussé à l'adoption de positions communes
déterminant des sanctions qui s'étaient
traduites par des règlements de restrictions aux
exportations. Ainsi la Position Commune 2007/140/PESC du
Conseil du 27 février 2007 concernant l'adoption
de mesures restrictives à l'encontre de l'Iran
avait été suivie du règlement 423/2007
du Conseil du 19 avril 2007 interdisant «de vendre, de
fournir, de transférer ou d'exporter,
directement ou indirectement, les biens et technologies
figurant à l'Annexe I du règlement
1334/2000 ».
Concernant la Corée du Nord, c'est le règlement
n° 329/2007 du Conseil du 27 mars 2007 qui était
venu interdire ces exportations. Les Etats membres ont donc
interdit ces exportations en se basant sur des règlements
antérieurs qui définissent et catégorisent
les biens à double usage et leur modalité de
contrôle et d'exportation au niveau
communautaire. Le Conseil y fait régulièrement
référence et base la mise en place de ces
sanctions sur les normes qu'ils établissent.
Le
cadre réglementaire spécifique
à l'Union européenne
Un champ de contrôle
commun à travers l'Annexe I L'Union
Européenne, dans sa volonté de constituer un
espace douanier homogène et harmonisé, a mis en
place plusieurs systèmes de normes et de contrôle.
L'objectif était de réussir à implanter
des cadres normatifs unifiés régissant
l'ensemble des transactions intra et extra-communautaires.
Dans cette optique, elle a élaboré des
règlements visant à généraliser
un certain nombre de pratiques et modalités de
contrôle des biens à double usage. La mise en
place de ce cadre commun s'est construite pas à pas
afin d'aboutir au régime le plus exhaustif, le plus
compréhensif et le plus efficient possible. A cette
fin, plusieurs règlements sont venus encadrer la
définition de la notion de biens à double usage
et son champ d'application. Ce sont ces règlements
et le champ des biens et pratiques qu'ils encadrent
qu'il s'agit désormais d'étudier
puisqu'ils servent de base aux politiques précédemment
évoquées. Bien que plus descriptive, cette
partie est nécessaire pour mieux appréhender la
réalité opérationnelle de ce contrôle.
-
Le règlement 1334/2000 et l'action commune
2000/401/PESC
Ce règlement s'inscrivait à la suite du
règlement (CE) n°3381/94 qui instituait déjà
un régime de contrôle des biens à double
usage. Dénoncé par la Cour dans des arrêts
de 1995 pour son fondement juridique trans-pilier et sa trop
grande complexité, ce régime avait donc été
abandonné pour être remplacé dès
2000 par ce règlement. Celui-ci visait à
harmoniser les différentes dispositions prises jusqu'à
alors. L'ambition affichée était, en effet, de
rendre ce contrôle, déjà en place à
l'époque du COCOM, homogène à l'échelle
communautaire. Il traduisait la volonté de la part des
Etats membres de se conformer à leurs engagements
internationaux et de contrôler efficacement les
transactions la communauté européenne et les
pays tiers. Le règlement s'est donc attaché à
donner une définition élargie des biens entrant
dans la catégorie des biens à double usage
renvoyant les pays membres à son Annexe I40 qui liste
l'ensemble des biens soumis à ce contrôle dans
une ambition exhaustive. Cette annexe reprend les biens
listés par les régimes de contrôle
internationaux (notamment l'arrangement de Wassenaar)
au niveau communautaire, c'est la liste de base des
biens soumis à contrôle, divisés en dix
catégories. Toutefois, le législateur européen,
dans un souci d'efficience, a aussi laissé la liberté
aux pays membres de contrôler des biens ne figurant pas
dans cette liste à leur discrétion, c'est
la clause « attrape tout», dont les effets seront
détaillés postérieurement. L'UE s'est
par ailleurs attachée à couvrir l'ensemble des
procédés d'exportations en y incluant les
exportations intangibles vers les pays tiers. Ainsi, les
transactions effectuées par courriers électroniques,
télécopies ou téléphone sont
tombées sous le contrôle institué par ce
règlement. Ce contrôle cible les technologies
duales, définies comme étant des «
connaissances spécifiques requises pour le
développement, la production ou l'utilisation
d'un produit ». Ces connaissances n'existant pas
nécessairement sous forme matérielle, elles
peuvent être exportées de manière
dématérialisée vers des pays tiers.
L'action commune du Conseil du 22 juin 2000, 2000/401/PESC
relative au contrôle de l'assistance technique liée
à certaines destinations finales militaires est venue
compléter le règlement 1334/2000. Elle a soumis
«l'assistance technique fournie en dehors de la
Communauté européenne par une personne physique
ou morale établie dans la Communauté européenne
» à des contrôles lorsqu'elle est
destinée à contribuer à une activité
relative à des armes de destruction massive ou à
certaines destinations finales militaires. La rédaction
de cet article a permis de couvrir les transferts de
technologies induits par l'assistance technique, même
s'ils impliquent des mouvements transfrontaliers de
personnes, ce que ne permettait pas le règlement
1334/2000.
En 2000, l'UE s'est donc dotée, à travers ces
textes, d'instruments de contrôle qui lui permettent de
contrôler un grand nombre d'activités, de biens
et de transactions dans le cadre du contrôle des biens
à double usage.
-
La refonte
par le règlement 428/2009 : transit,
courtage
L'extension continue du cadre général de
contrôle Le règlement 428/2009 est venu abroger
le règlement 1334/2000 et reprend ses dispositions
tout en y ajoutant de nouvelles. L'intérêt de
cette refonte réside notamment dans la redéfinition
de certains types d'activités liés au commerce
des biens à double usage et à la mise à
jour de l'Annexe I, base du contrôle des Etats membres,
face aux innovations technologiques dans le domaine. Le but
était de maintenir le contrôle effectif en
prenant en compte de nouveaux biens et pratiques échappant
au règlement précédent, et pourtant
extrêmement sensibles.
Le transit
Cette révision a permis d'introduire les transits de
biens à double usage aux activités contrôlées.
L'article 6 précise donc qu'un Etat membre peut
interdire le transit de ces biens s'ils sont
susceptibles de figurer sur la liste de l'Annexe I (mise à
jour) ou s'ils relèvent des mesures visées aux
articles 4 et 8. Ces biens sont contrôlés en
raison de leur passage sur le territoire de la communauté
européenne, il n'est pas nécessaire qu'il soit
exporté depuis un pays membre. C'est donc un
élargissement du champ du contrôle
communautaire et une lecture extensive de la territorialité
de son champ de compétence.
Le courtage
Le règlement a étendu ce contrôle à
la prestation de services liés aux biens à
double usage. L'article 7 permet le contrôle de
fourniture de services, à condition qu'elle
n'implique pas de mouvement transfrontalier de personnes.
C'est donc un contrôle étendu aux activités
de personnes en rapport avec l'exportation de biens à
double usage Le courtage est plus précisément
contrôlé au nom de l'article 5 du règlement
qui le définit comme tel :
- La négociation ou la gestion de transactions en
vue de l'achat, la vente ou la fourniture des biens à
double usage d'un pays tiers vers un autre pays tiers, ou
- La vente ou l'achat de biens à double usage qui se
situent dans des pays tiers en vue de leur transfert vers
un autre pays tiers. C'est-à-dire qu'une entité
ou une personne établie au sein de l'Union
Européenne organisant une transaction entre des
Etats extra-communautaires sont susceptibles d'être
sujettes à ce contrôle. Le bien n'a pas besoin
de transiter physiquement par le territoire communautaire
dès lors que le contrôle porte sur la
prestation d'un service et non le bien en question. C'est
d'ailleurs une autorisation spécifique de courtage
qui est nécessaire, et non une licence d'exportation
. Ce contrôle est rendu possible par la
territorialité du service rendu, mais si l'entité
est implantée dans un Etat tiers, l'UE n'est pas
compétente.
Les exportations intangibles
Enfin, le règlement est venu clarifier la notion des
exportations intangibles de technologies à double
usage. En effet, il s'est avéré difficile de
situer avec certitude la destination de certaines de ces
exportations, notamment un courrier électronique.
C'est pourquoi le nouveau règlement 428/2009 a
précisé la définition d'exportations
intangibles en incluant dans sa définition, à
son 'article 2.2 iii, l'action de mettre «à
disposition sous forme électronique des logiciels ou
technologies à l'intention de personnes physiques ou
morales […] à l'extérieur de la
communauté ». Dès lors toutes
technologies duales rendues accessibles à des acteurs
extra-communautaires par le biais de serveur intranet ou
internet est susceptible de contrôle. C'est donc
un champ de contrôle extrêmement élargi.
Une récente mise à jour
Dans un souci d'efficacité et de cohérence,
l'UE a engagé plusieurs remises à jour du
cadre de contrôle, la dernière étant
celle de 2014. Après que le Conseil de l'Europe a
rendu un avis favorable au renforcement du contrôle
des exportations le 21 novembre 2014, le règlement
n°1382/2014 venu modifier le règlement 428/2009.
Dans son avis, le Conseil insiste sur la nécessité
de continuer les efforts jusqu'alors fournis en matière
de contrôle des exportations intangibles, notamment
sur les technologies, et d'inclure les technologies de
surveillance et d'informations au régime de contrôle.
Ainsi, le règlement du 22 octobre 2014 a publié
une « version actualisée et consolidée »
de l'annexe I du règlement 428/200949. Désormais,
donc, les biens relatifs à la sécurité
de l'information font partie de l'Annexe I, catégorie
5, partie II, et sont, à ce titre contrôlé
par les Etats membres et soumis à un régime de
licence. C'est là tout l'enjeu de ces différentes
listes et règlements évoqués jusqu'ici.
Ils servent de base aux Etats membres pour mettre en place
un système de contrôle qui se traduit,
notamment, par l'attribution spécifique de licences
permettant les transactions liées aux biens ici
listés. Ainsi, s'il est nécessaire d'avoir une
idée des différents biens et activités
soumis à ce contrôle et du caractère
très évolutif de cette base, il s'agit
désormais de s'intéresser aux procédures
de contrôle qui en découlent
-
La refonte
par le règlement 821/2021 : la cybersécurité
L'UE comme vecteur d'harmonisation des
procédures nationales
La seule harmonisation de la nomenclature des biens à
double usage ne constitue pas une garantie suffisante et
nécessaire à une harmonisation effective du
contrôle. C'est pour cette raison que l'UE,
si elle se base sur l'arrangement de Wassenaar pour
arrêter la liste des biens qu'elle soumet à
contrôle, a entendu doter les Etats membres de
procédures communes. L'objectif de la
réglementation européenne est donc bien «
d'instituer un régime commun de contrôle
et de politiques de contrôle harmonisées ».
Dans cet objectif, elle a mis en place un procédé
d'autorisation d'exportation obligatoire et
harmonisé.
-
Harmonisation des autorisations aux exportations vers des
pays tiers
Une uniformisation du système d'attribution des
licences était nécessaire. En effet, l'UE
se doit de se conformer à ses objectifs commerciaux de
facilitation de la libre circulation des marchandises et de
libre-échange. Un particularisme national dans
l'attribution des licences d'exportation aurait
créé des complications administratives aux
exportations, sans évoquer les risques sécuritaires
déjà évoqués précédemment.
La mise en place d'un système commun de licences
a permis de fluidifier les échanges et de fournir des
garanties aux producteurs. Aussi, une licence attribuée
dans un Etat membre sera valable dans le reste de l'Union
(article 9.2 règlement (CE) n°428/2009). Cette
universalité des licences implique des règles
d'attribution cadrées. Le règlement
prévoit donc des types de licences spécifiques
en fonction des pratiques et profils des exportateurs,
toujours dans le but de faciliter le commerce.
Les licences individuelles
C'est la forme la plus classique des autorisations,
elle représente la quasi-totalité des 4000
demandes annuelles traitées par le Service des Biens
à Double Usage (SBDU) Elle permet à un
exportateur déterminé de procéder aux
exportations liées à une opération
précise (un ou plusieurs biens vers un destinataire
ou utilisateur final dans un pays tiers). Prévue à
l'article 9 du règlement n°428/2009, cette
licence est accordée par les autorités
nationales. Elle doit mentionner l'utilisateur final,
le pays de destination et l'utilisation finale. Le
volume (limité), la valeur (limitée) et la
nature (sa catégorie au sens de l'Annexe I) des
marchandises doivent aussi figurer sur cette autorisation
afin de permettre des contrôles en douanes facilités.
Par ailleurs, l'Etat membre peut exiger une
déclaration d'utilisation finale de la part du
destinataire d'un pays tiers, même si sa propre
législation ne l'y oblige pas. Ce procédé
permet une harmonisation procédurale qui tend à
dépasser le cadre de l'Union. Toutefois,
obtenir cette licence est un processus administrativement
lourd (délais de 60 jours en mars 2012, selon les
chiffres du Service des Biens à Double Usage, à
la Direction Générale de l'Entreprise).
De plus, une licence n'est valable que pour un délai
déterminé, 4 mois en France. Aussi, il existe
d'autres régimes de licences visant à
faciliter les exportations en fonction des risques
présentés.
Les licences globales
Comme les licences individuelles, ces licences sont
octroyées à un opérateur particulier.
Elles s'en distinguent par leur caractère moins
contraignant. Toutefois, elles sont moins régulièrement
attribuées : une quarantaine de ces licences sont
attribuées annuellement en France par le SBDU. Mais
elles permettent aux exportateurs réguliers de
s'affranchir de contraintes administratives
récurrentes. Il s'agit donc d'une autorisation
octroyée à un exportateur particulier, pour un
type ou une catégorie précis de biens à
double usage. L'autorisation est valable pour des
exportations vers un ou plusieurs utilisateurs/destinataires
finaux spécifiques et considérés comme
non sensibles, dans un ou plusieurs pays de destination
tiers spécifiques, membre des régimes de
non-prolifération. Par ailleurs, ce type de licence a
une validité minimale de 12 mois et peut être
établi sans limite de valeur et de quantité.
Mais l'UE est allée plus loin en mettant en
place des licences plus larges pour des exportations à
l'objet et aux destinations spécifiques.
Les licences générales communautaires
Il s'agit d'une autorisation d'exportation pour
certains pays de destination, octroyée à
l'ensemble des exportateurs qui respectent les
conditions et exigences d'utilisation telles qu'elles
figurent aux annexes IIa à IIf du règlement
(CE) 428/2009 modifié. Ce sont donc des licences
octroyées plus facilement et relatives à des
cas généraux. Au contraire des licences
individuelles, ces licences s'inscrivent dans un cadre
préétabli. Le but de ces licences est de
faciliter les exportations vers les pays considérés
comme des destinations sécurisées et pour des
biens prédéfinis. Elles rendent les contrôles
plus souples et modulables en allégeant les
procédures de demande d'autorisation. Elles
présentent par ailleurs une certaine dimension
diplomatique à travers la définition de ces
destinations sécurisées. En effet, figurer sur
ces listes représente un intérêt
stratégique et économique majeur pour les
partenaires de l'UE qui voient les échanges de
marchandises et de technologies sensibles facilités.
Il existe ainsi six licences générales
communautaires, et chacune fixe des régimes
spécifiques. La licence couvrant le plus de biens,
presque la totalité des biens visés à
l'Annexe I, s'applique ainsi à quelques
pays (7) partis de l'Arrangement de Wassenaar et
partenaires commerciaux majeurs de l'UE (Australie,
Nouvelle-Zélande, Canada, Norvège, États-Unis
d'Amérique, Japon, Liechtenstein). Cette licence,
l'Autorisation générale communautaire
EU001 (AGCE), se réfère à l'Annexe
II du règlement 428/2009 modifié qui liste les
biens concernés (soit l'Annexe I sans les biens
les plus sensibles, de l'Annexe IV). Les licences les
plus circonscrites à quelques situations
(exportations temporaires pour expositions et foires,
Autorisation générale communautaire EU004), ou
catégories de biens (Télécommunications,
Autorisation générale communautaire EU005),
s'appliquent à un plus grand nombre de pays,
jusqu'à 24 (dont la Russie, l'Inde ou
l'Ukraine). C'est donc un contrôle sur
mesure que l'UE entend mettre en place, fonction de
ses intérêts commerciaux et sécuritaires.
Ainsi, le Conseil a récemment déclaré
être favorable « à une éventuelle
introduction de nouvelles autorisations générales
d'exportation de l'Union, qui peuvent faciliter les échanges
commerciaux à faible risque dans l'intérêt
de l'ensemble des entreprises européennes tout en
maintenant le niveau élevé des contrôles
en vigueur ». Ces différentes licences
participent d'un système harmonisé de
procédures d'autorisation aux exportations pour
toute la zone UE qui permet la réalisation d'une
politique commerciale et concertée, respectant les
intérêts économiques des Etats membres.
Ainsi, les sept pays concernés par l'AGCE EU
001 représentaient, en 1998, lors des discussions sur
la réforme du régime communautaire, plus de 70
% des exportations vers des pays tiers des biens et
technologies à double usage à eux seuls. En
2012, c'est toujours la licence générale
la plus demandée par les exportateurs.
-
Les échanges intra-communautaires
Bien que la majorité des biens à double usage
soit susceptible d'être exportée sans
contrôle d'un Etat membre vers un autre, les
biens listés à l'Annexe IV requièrent
l'obtention d'une licence d'exportation
délivrée par les autorités nationales.
Cette restriction supplémentaire interpelle alors que
la réalisation du marché intérieur en
1993 avait entrainé la suppression de la majorité
des contrôles aux frontières internes au sein de
la zone UE. Il s'agit donc de rappeler que si l'UE
est une union douanière, l'article 36 TFUE
permet les « interdictions ou restrictions
d'importation, d'exportation ou de transit, justifiées
par des raisons […] de sécurité publique
». Ainsi, l'Annexe IV du règlement
n°428/2009, remise à jour par le règlement
n°1382/2014, liste les biens les plus sensibles de
l'Annexe I. C'est-à-dire les produits
relevant de la technologie de la furtivité, du
contrôle stratégique communautaire (amorçage
d'explosifs, cryptologie) de la technologie MTCR
(régime de contrôle de la technologie des
missiles), ou de la convention sur les armes chimiques et la
technologie du NSG (groupe des fournisseurs nucléaires)
58. C'est donc pour les biens les plus susceptibles
d'être détournés à des fins
militaires que ces exportations sont soumises à
licence. Toutefois, contrairement aux exportations à
destination de pays tiers, il n'existe pas de
formalités de dédouanement pour les échanges
intracommunautaires. C'est-à-dire la réalisation
de contrôle en douanes. C'est donc un régime
de contrôle moins encadré que celui appliqué
aux exportations vers les pays tiers mais qui témoigne
d'une volonté communautaire d'encadrer de
manière stricte ces échanges, fussent-ils
intracommunautaires. Le régime de contrôle est
ainsi basé sur un triple processus de facilitation des
échanges ou de contrôle accru, à travers
les trois annexes, les quatre types de licences et les trois
destinations (UE/zone de convergence/le reste du monde). La
sensibilité des biens et technologies se détermine
à la fois en soi, et à partir des destinations,
ce qui donne quatre cas de sensibilité (du plus clair
au plus sombre dans le tableau suivant). Il est par ailleurs
à repréciser que certains pays tiers non
concernés par l'AGCE EU001 font l'objet de
quelques licences générales communautaires
moins compréhensives. Le règlement 428/2009
organise un régime communautaire de contrôle des
exportations de biens à double usage basé sur «
un système commun de contrôle et de politiques
harmonisées d'application et de contrôle
dans tous les Etats membres » (Considérant n°
4 du règlement 428/2009). Mais les modalités
d'application des contrôles organisés par
ce règlement relèvent de l'appréciation
des pays membres. Les règlements communautaires fixent
un cadre de contrôle harmonisé mais, en
l'absence d'une administration communautaire,
l'exécution de celui-ci relève des
prérogatives des Etats membres. En effet, si la mise
en place d'une politique communautaire de contrôle
et la conception d'un cadre harmonisé visent à
éviter l'existence de différences
préjudiciables entre pays membres au sein d'un
espace de libre-échange, l'absence d'une
entité supra-étatique d'exécution
ne peut être occultée. En l'espèce
ce sont bien les Etats qui sont les exécutants de
cette politique. A ce titre, ils gardent donc une certaine
marge de manoeuvre qu'il s'agit maintenant
d'évaluer.
L'application
de la réglementation des biens à
double usage
La
"clause attrape tout"
Cette règle
figurant à l'article 4 du règlement N°
428/2009 modifié résulte à l'origine de
la transposition en droit européen des
accords internationaux en matière de
non-prolifération, à savoir :
- la directive n°
7 du MTCR indiquant :
« Le Gouvernement :
A) veillera à ce que ses
contrôles nationaux à l'exportation exigent
une autorisation pour le transfert d'articles ne figurant
pas à l'Annexe si l'exportateur a été
informé par les autorités compétentes
du Gouvernement que ces articles sont destinés à
être utilisés, en totalité ou en
partie, en liaison avec des systèmes de lancement
d'armes de destruction massive autres que des avions
pilotés par l'homme;
B) et, si l'exportateur a
connaissance que des articles ne figurant pas à
l'Annexe sont destinés à contribuer à
ces activités, en totalité ou dans la
mesure compatible avec ses contrôles nationaux à
l'exportation, que l'exportateur informe les autorités
susmentionnées qui détermineront s'il est
approprié ou non de soumettre l'exportation
concernée à autorisation."
Cette directive du MTCR,
publiée à l'adresse
http://www.mtcr.info/french/leslignes.html exclut les avions
pilotés par l'homme. Cela ne concerne pas tous les «
aéronefs » définis dans le règlement
n° 428/2009 modifié, puisque les hélicoptères
civils (même légers), capables de déposer
des charges importantes en un point précis, font
l'objet d'un texte pris en application du règlement n°
428/2009 modifié, qui est l'arrêté
du 31 juillet 2014.
-
les dispositions
générales 1a et 1b applicables aux participants
du Groupe d'Australie (AG)
'' Les membres
doivent s'assurer que leur réglementation
comprendra les exigences suivantes :
A) une autorisation obligatoire pour
le transfert d'articles non réglementés par
le Groupe d'Australie dans les cas où
l'exportateur est informé par les autorités
compétentes de l'État participant que les
articles exportés pourraient servir, en tout ou en
partie, à des armes chimiques ou biologiques ;
B) si l'exportateur est au courant
que les articles non réglementés sont
destinés à des armes chimiques ou
biologiques, il doit en aviser les autorités
mentionnées ci-dessus, qui décideront s'il
est indiqué ou non d'autoriser l'exportation en
question.
-
le communiqué
de presse de la part du Groupe des fournisseurs nucléaires
(NSG)
publié à
l'issue de sa 14ème scéance plénière
des 27 et 28 mai 2004 à Götegorg en Suède
par la déclaration suivantes :
In order to strengthen further the Participating
Governments' national export controls, the Plenary
decided to adopt, inter alia, the following measures :
A "catch-all"
mechanism in the NSG Guidelines, to provide a national
legal basis to control the export of nuclear related
items that are not on the control lists, when such items
are or may be intended for use in connection with a
nuclear weapons programme.
...
-
la déclaration d'interprétation des biens ne
figurant pas sur les listes de l'arrangement de Wassenaar
publiés
lors de la session plénière de l'année
2003
« Participating
States will take appropriate measures to ensure that their
regulations require authorisation for the transfer of
non-listed dual-use items to destinations subject to a
binding United Nations Security Council arms embargo, any
relevant regional arms embargo either binding on a
Participating State or to which a Participating State has
voluntarily consented to adhere, when the authorities of
the exporting country inform the exporter that the items
in question are or may be intended, entirely or in part,
for a military end-use.* If the exporter is aware that
items in question are intended, entirely or in part, for a
military end-use,* the exporter must notify the
authorities referred to above, which will decide whether
or not it is expedient to make the export concerned
subject to authorisation. For the purpose of such control,
each Participating State will determine at domestic level
its own definition of the term "military end-use”.*
Participating States are encouraged to share information
on these definitions. The definition provided in the
footnote will serve as a guide. Participating States
reserve the right to adopt and implement national measures
to restrict exports for other reasons of public policy,
taking into consideration the principles and objectives of
the Wassenaar Arrangement. Participating States may share
information on these measures as a regular part of the
General Information Exchange. Participating States decide
to exchange information on this type of denials relevant
for the purposes of the Wassenaar Arrangement. »
Cette "clause
attrape tout" a ainsn été étendue
à l'ensemble des biens listés par les autres
régimes de non prolifération des armes de
destruction massive et porte seulement sur les biens
susceptibles d'un détournement de leurs usages
purement civils pour concevoir, produire ou utiliser des
armes de destruction massive, à savoir les armes
nucléaires, chimiques ou biologiques et leurs vecteurs
(aériens ou sous-marins). Elle ne s'applique pas aux
biens disponibles dans le commerce et utilisables à
des fins terroristes : gaz butane, nitrate d'ammonium,
chlorate de potassium ... etc.
En Union européenne,
vu les considérants n°s 4 et 8 du règlement
n° 428/ 2009 modifié, cette "clause
attrape tout" ne porte que sur les biens susceptibles
d'un détournement de leurs usages purement civils pour
concevoir, produire ou utiliser des armes de destruction
massive, à savoir les armes nucléaires,
chimiques ou biologiques et leurs vecteurs (aériens ou
sous-marins). Elle ne s'applique pas aux biens disponibles
dans le commerce et utilisables à des fins terroristes
tels que : le gaz butane, le nitrate d'ammonium, le chlorate
de potassium ... etc
En France, les textes
pris en application des articles 4 et 8 du règlement
n° 428/2009 modifié ne portent que sur
les hélicoptères civils (même légers),
capables de déposer des charges importantes en un
point précis, ainsi que sur les produits lacrymogènes
et agents anti-émeutes qui, à fortes
concentrations sont équivalents à de véritables
armes chimiques.
Pour le reste,
l'application de la "clause attrape-tout" est
laissée à la libre appréciation des
ingénieurs du SBDU qui ont à traiter des
centaines de "dossiers hors licence" et qui
saisissent le commission interministérielle des biens
à double usage par crainte d'un détournement à
des fins malveillantes de certaines marchandises libres à
l'exportation. Beaucoup d'exportateurs veulent en effet faire
confirmer par le SBDU que leur marchandise est bien libre à
l'exportation en attente de leur chargement en avion,ou en
bâteau, et trouvent en réponse, plusieurs
semaines après leur démarche, une interdiction
d'exporter sans aucune motivation leur empêchant
d'honorer leur contrat. Assez souvent, les interdiction
d'exporter décidées ainsi arbitrairement par le
SBDU résultent aussi des demandes de la part des
contrôleurs des douanes qui empêchent les camions
de partir par crainte de laisser passer du matériel
stratégique, alors que le matériel en question
est libre à l'exportation et qu'aucune justification
n'est communiquées à l'intéressé.
Aux USA, la règle
concernant les biens à usage civil susceptibles d'un
détournement à usage malveillant est au
contraire très explicite et vise aussi les biens
cicils susceptibles de porter atteinte à la sécurité
des USA. Les autorités américaines ont en effet
ajouté de nombreux articles correspondant à des
biens non repris dans les listes des instances
intergouvernementales de lutte contre la prolifération
des armes de destruction massive (citées ci-dessus).
La Commerce Control List (CCL) comporte, parmi ses articles
dénommés Export Control Classification Number
(ECCN), une série de biens appelés EAR99 mis
sous contrôle éventuel pour des raisons de
sécurité.
La règlementation
américaine en matière de contrôle de
biens à double usage, appelée Export
Administration Regulation (EAR) précise en effet ceci
:
"If Your Item is Not on the
Commerce Control List - EAR99
If your item falls under the
jurisdiction of the U.S. Department of Commerce and is
not listed on the CCL, it is designated as EAR99. The
majority of commercial products are designated EAR99 and
generally will not require a license to be exported or
reexported.
However, if you plan to export
an EAR99 item to an embargoed or sanctioned country, to
a party of concern, or in support of a prohibited
end-use, you may be required to obtain a license."
Conformément au
principe de la clause attrape tout, cette liste n'est pas
exhaustive, mais donne toutefois des moyens juridiques aux
organismes de contrôle américains d'interdire
plus facilement des exportations de produits ou d'équipements
susceptibles d'être détournés à
des fins terroristes et de les sanctionner a posteriori.
Par exemple, le nitrate
d'ammonium et les engrais à base de nitrate d'ammonium
relèvent de l'article ECCN n° 1C997 de la CCL
américaine car on sait qu'ils sont utilisables pour
fabriquer des bombes artisanales au moyen d'explosifs de type
ANFO (explosifs de carrière) remplis dans des
appareils de cuisson ménagers (cocottes minute) ou
dans des bouteilles de gaz vides ; comme cela s'est produit
en Corse, en Irlande du Nord, en Espagne, en Norvège,
au marathon de boston, au Moyen orient... etc.
En revanche, compte tenu
de risques d'attentats similaires, et connaissant les dangers
du nitrate d'ammonium pour engrais et explosifs de carrières
(dont des tonnes ont explosé accidentellement dans
l'usine AZF de Toulouse), la « clause attrape-tout »
ne permettrait pas à la France d'interdire une
exportations de nitrate d'ammonium (ou d'engrais riche en
nitrate d'ammonium) vers certaines destinations sans que ses
services n'aient été informés d'un doute
sur cette vente à l'étranger. De plus, cette
disposition non explicite ne lui donnerait pas le moyen
juridique de sanctionner a posteriori, en référence
à la réglementation des biens à double
usage. une exportation illicite de ce produit qui aurait été
utilisé pour commettre un attentat à
l'étranger.
On retrouve ainsi un
vide juridique équivalent à celui de l'époque
où des entreprises françaises ont fourni
impunément des biens servant à fabriquer des
armes chimiques au Moyen Orient. La France a été
durement frappée par le terrorisme le soir du 13
novembre 2015. Depuis les attentats du 11 septembre
2001 à New York, les USA sont plus vigilants que
nous sur leurs exportations de produits sensibles en ajoutant
une liste de biens "EAR99" aux listes
internationales.
D'ailleurs, des
sanctions américaines s'appliquent dans le monde
entier en cas de violation de l'Export Administration
Regulation (EAR), c'est à dire si le Bureau of
Industry and Security (BIS) a connaissance d'exportations ou
d'actes de négoce sans licence US, concernant des
biens d'origine américaine soumis à contrôle.
Ces sanctions sont très sévères si ces
infractions sont commises par des filiales de groupes
américains à l'extérieur des USA, ou si
celles-ci font l'objet d'opérations financières
en dollars réalisées à partir de banques
américaines. Toute turpitude de ce genre, commise aux
USA ou ailleurs dans le monde, fait l'objet de l'inscription
de la personne ou de l'entreprise concernée sur une
liste noire l'empêchant de soumissionner aux appels
d'offre et l'interdisant d'acheter des biens américains,
ce qui lui crée une mauvaise réputation pour
ses affaires commerciales. Cela peut aussi aboutir à
une plainte devant la justice américaine entraînant
des sanctions financières ou pénales ; ou à
une dénonciation par voie diplomatique dans le pays
concerné, en vue de poursuites judiciaires de la part
des autorités localesen application des
réglementations nationales en vigueur concernant les
biens à double usage ou soumis à embargo .
La corrélation
des biens à double usage avec la nomenclature
douanière
Le contrôle sur le
terrain effectué par les contrôleurs des douanes
au moyen de leur système informatique repose sur le
code de classement des marchandises dans le tarif intégré
communautaire à huit chiffres (TARIC) dont les deux
derniers complètent le code de la nomenclature
combinée du tarif douanier commun. La table de
corrélation entre les codes de la nomenclature
combinée et les articles de la liste des biens à
double usage a été mise à jour en2017 par la Commision européenne pour
l'intégration des codes BDU dans le TARIC. Elle
beaucoup plus exhaustive que celles des années 2006,
2012 et 2014, celle ci ne comporte plus les erreurs de classement qui
conduisaient au blocage par les douanes européennes de
beaucoup de marchandises libres à l'exportation. Ce
système n'est toutefois pas très fiable dans la
mesure où la table de corrélation des codes BDU
avec ceux de la nomenclature combinée, qui comporte
6800 lignes au lieu de 4200 en 2012, car chacune d'entre elle
couvre des marchandises qui ne présentent aucun
caractère stratégique, ce qui risque
d'accroître encore plus les risques d'entraves aux
esportations
L'administration des
douanes a utilisé cette liste de corrélation de
l'Union européenne pour instaurer un système
d'information au moyen de codes document, de dispositions
tarifaires particulières et de codes additionnels
nationaux (CANA permettant aux opérateurs indiquer
dans leurs déclarations si les matériels
relèvent ou non de la réglementation des BDU,
ou s'ils font l'objet de mesures restrictives à
l'exportation. Ce système permet théoriquement
aux services de douane de contrôler les produits de
hautes technologies susceptibles d'être soumis aux
contrôles à l'exportation.
La télé-procédure
DELTA (Dédouanement En Ligne par Traitement
Automatisé) permet d'accomplir les formalités
déclaratives douanières en ligne. Lors de
l'établissement de la déclaration
d'exportation, l'opérateur doit indiquer en case 44 le
code approprié :
X002 (code document)
pour les biens à double usage visés à
l'annexe I du règlement communautaire ou soumis
à la clause attrape-tout (Nota : depuis le 1er
janvier 2015, ce code remplace le CANA R408) ;
Y 901 (disposition
tarifaire particulière) pour les biens ne présentant
pas les caractéristiques d'un bien à double
usage repris à l'annexe I du règlement
communautaire ;
R 409 (CANA) pour les
hélicoptères civils et leurs pièces
essentielles à destination des pays sous sanctions,
soumis à des mesures nationales de contrôle ;
R 410 (CANA) pour les
gaz lacrymogènes et agents anti-émeutes,
soumis à des mesures nationales de contrôle ;
R 412 (CANA) Pour
mémoire, ce CANA concernait jusqu'au 31 janvier 2015
les moyens d'interception des télécommunications
mobiles ou de surveillance de l'internet. Depuis, ces
marchandises doivent être reprises sous le code X002.
R 499 (CANA) si les
marchandises sont libres de toute obligation relative aux
réglementations applicables aux marchandises
stratégiques c'est-à-dire si le matériel
n'est ni soumis à la réglementation
nationale sur les biens à double usage (cf page 7 et
CANA repris ci-dessus), ni à celle des matériels
de guerre, ni à celle des produits explosifs.
Dans l'hypothèse
où la marchandise est soumise à une mesure de
contrôle nationale de biens à double usage,
l'opérateur doit également indiquer dans la
déclaration d'exportation en case 44 le code document
correspondant à l'autorisation utilisée. Il
s'agit du code 2410 pour toutes les licences associées
aux CANA R 409 et R 410.
C'est ainsi que des
centaines par an de "dossiers hors licence" de
biens n'ayant aucun caractère stratégique sont
traités par le service des biens à double
usage, soit par suite de blocages intempestifs par les
bureaux de douane, soit par crainte de ce désagrément
de la part des industriels si la position tarifaire d'un bien
libre à l'exportation présente un CANA se
référant à un alinéa de la liste
des BDU ou des biens soumis à des mesures
restrictives.
Pour éviter ces
inconvénients, il faudrait que la Commission
européenne crée deux subdivisions dans toutes
les sous-positions de la nomenclature combinée
susceptibles de contenir des biens stratégiques :
l'une qui intégre les libellés des biens à
double usage ou soumis à restrictions vers certaines
destinations, et l'autre qui correspond aux biens libres à
l'exportation. Il faudrait en outre qu'elle communique les
caractéristiques des biens réellement soumis à
contrôle dans les notes explicatives de la nomenclature
combinée (NC).
Les sous-positions NC
reprenant les libellés d'alinéas des biens à
double usage auraient alors une portée légale
en application de la note générale n° 6
d'interprétation de la nomenclature combinée
reproduite ci-dessous.
"A.
Règles générales pour
l'interprétation de la nomenclature combinée
Le
classement des marchandises dans la nomenclature combinée
est effectué conformément aux principes
ci-après :
6.
Le classement des marchandises dans les sous-positions
d'une même position est déterminé
légalement d'après les termes de ces
sous-positions et des notes de sous-positions ainsi que,
mutatis mutandis, d'après les règles
ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être
comparées que les sous-positions de même
niveau. Aux fins de cette règle, les notes de
sections et de chapitres sont également
applicables sauf dispositions contraires."
Cette intégration
des produits stratégiques dans la nomenclature
combinée permettrait une meilleure information des
opérateurs sur les produits stratégiques,
d'autant que l'indication des codes des sous-positions SH6 du
Système harmonisé de désignation et
codification des marchandises deviendra obligatoire, avant
les déclarations, dans les messages de sécurité
ICS et ECS, en 2016, dès la mise en oeuvre du Code de
l'Union.
L'organisation de
l'Etat en matière de contrôle des biens à
double usage
Depuis la première
réforme de l'ex-SGDN en 1995, puis de celle de la
transformation de l'ex-SGDN en SGDSN dépendant à
la fois du Premier Ministre et du Président de la
république, et enfin de la création de la
Commission interministérielle des biens à
double usage, cette instance interministérielle n'a
plus aucun rôle de coordination de l'action
ministérielle dans ce domaine.
Suite à la lettre
de mission du Premier ministre du 21 juin 2013, un rapport
d'orientation sur le rapprochement des dispositifs de
contrôle des transferts des technologies civiles et
militaires sensibles a été rendu par la Cour
des Comptes en janvier 2014. Ce rapport part du constat que
le système français est complexe et rigide, et
propose l'institution d'une Autorité
interministérielle. Selon le rapport, en raison de la
diminution du budget consacré à la défense,
les entreprises se tournent d'avantage vers la
production de biens à double usage. De ce fait, ll
considère qu'il faut également améliorer
la coordination et le pilotage général des
procédures de contrôle des transferts sensibles
placé au niveau interministériel, absent
aujourd'hui dans le contrôle des exportations
français. Selon la Cour des Comptes, la création
d'une Autorité placée auprès du
Premier ministre, dont les moyens pourraient être gérés
par le SGDSN apparaitrait comme une alternative efficace pour
répondre à ces problèmes. "L'autorité
assurerait la responsabilité de la définition,
de l'orientation, et du suivi de la politique
applicable en la matière. Elle serait chargée
de l'évaluation permanente du système de
contrôle pour proposer des évolutions du cadre
réglementaire ou de l'organisation. Elle
assurerait le pilotage des divers dispositifs administratifs
intervenant en ces domaines". Elle chapeauterait donc
toutes les structures actuelles, sans pour autant les
remplacer dans le rôle d'instruction des dossiers
et jouerait le rôle d'une interface directe avec
le gouvernement. Elle assurerait une meilleure répartition
des dossiers de demande d'autorisation de transferts
entre toutes les institutions ainsi qu'une meilleure
coopération (entre le SBDU et le SGDSN) pour les
dossiers relevant d'une moindre difficulté. Les
cas les plus sensibles seraient en revanche arbitrés
par l'Autorité elle-même après
consultation d'une ou deux commissions
interministérielles. L'autorité aurait en
outre le pouvoir de soumettre à autorisation au
gouvernement les cas qui nécessitent un choix
politique. Selon le rapport, "avec cette organisation,
le traitement des dossiers les plus simples pourrait être
fluidifié, donc simplifié et plus rapide,
tandis que les dossiers appelant les arbitrages pourraient
être traité à haut niveau dans de
meilleurs délais".
Le propositions de la
Cour des comptes ont fait l'objet d'une opposition de la part
des ministères concernés, notamment de la part
du Ministère des affaires étrangères,
dont le ministe Laurent Fabius est une personnalité
politique importante qui ne tient certainement pas à
ce que ses services perdent la prérogative de la
présidence de la Commission interministérielle
des biens à double usage, alors que le problème
n'est pas seulement d'ordre diplomatique.
La délivrance des
licences relevait initialement du Service des Titres du
Commerce Extérieur (SETICE), dépendant des
douanes. Depuis la création du Service des Biens à
Double Usage par un arrêté du 18 mars 2010,
c'est la Direction Générale des
Entreprises (ex-DGCIS depuis le 16 septembre 2014) qui a la
charge de cette mission. On a donc assisté à un
transfert de compétences de la Douane vers la
Direction Générale des Entreprises. Ce
transfert s'explique, par le manque d'ingénieurs
au sein des services douaniers afin de classifier les
produits concernés. Il a donc permis un recentrage des
missions douanières et de soulager les effectifs
réduits du laboratoire des douanes, le Service Commun
des Laboratoires (SCL). Ainsi, au moment de s'intéresser
à la première étape du contrôle,
l'attribution des licences, il apparaît déjà
que la Douane est dans une dynamique de recentrage de ses
missions dans le cadre du contrôle des biens à
double usage. Depuis 2010 c'est le SBDU qui est
l'interlocuteur premier des entreprises et le premier
acteur du contrôle. Son directeur dispose de 18 agents
dont 7 ingénieurs (contre 3 à 4 antérieurement
au SETICE). C'est près de la moitié des
agents travaillant à ce contrôle sur l'ensemble
du territoire. Le rôle du SBDU réside dans
l'examen des demandes de licences. Il vérifie
que les biens concernés sont en effet des biens à
double usage, que le pays de destination final n'est
pas concerné par des restrictions, que l'utilisateur
final est de confiance et que la licence concernée
répond au couple produit-pays-utilisateur qui lui
correspond. On ne reviendra pas ici sur les différents
types de licences mais c'est le SBDU et ses équipes
d'ingénieurs et d'administrateurs qui sont
les garants de ce travail de mise en conformité des
entreprises avec les règlements communautaires et les
mesures adoptées au niveau national. Le SBDU est
toutefois secondé par les services des différents
ministères présents à la Commission
Interministérielle sur les Biens à Double
Usage. Par exemple, la Direction Générale de
l'Armement (DGA), qui reçoit les demandes
d'autorisations d'exportation pour les armes
conventionnelles, va rediriger les industriels dont les
marchandises sont plutôt susceptibles d'être
des biens à double usage.
-
La
Commission Interministérielle des Biens à
Double Usage (CIBDU)
La CIBDU a été
créée par le décret n° 2010-294 du
18 mars 2010 portant création d'une commission
interministérielle des biens à double usage. En
vertu de ce décret, sa présidence est assurée
par un représentant du Ministère des Affaires
Etrangères (article 4), le directeur adjoint des
affaires stratégiques. De plus, son ordre du jour est
défini par le Ministère et ses réunions
ont lieu au Quai d'Orsay. Toutefois, son secrétariat
est assuré par le SBDU et la commission regroupe des
représentants de nombreux services et ministères,
dont la Défense, les Douanes, le Commissariat à
l'énergie atomique, le commerce extérieur
ou l'industrie. Au total ce sont une douzaine de
représentants de différents ministères
et services qui se regroupent dans cette commission. Le rôle
de cette commission, qui se réunit mensuellement, est
d'étudier les dossiers les plus sensibles
traités par le SBDU (20 à 25% des dossiers) ou
reçus par les différents ministères.
Elle rend ensuite un avis sur la soumission d'un bien à
autorisation d'exportation. De plus, c'est elle qui
statue sur l'entrée d'un bien dans le
régime de contrôle par le biais de la clause «
attrape-tout ». Chaque ministère exprime sa
position sur le bien en question et un consensus est
recherché pour arrêter une position nationale
sur le bien concerné. Toutefois, les lignes défendues
par chaque Ministère ne sont pas nécessairement
convergentes, ains le SBDU défend prioritairement les
intérêts des industriels, tandis que le
représentant du, Ministère de la Défense
est chargé de s'intéresser aux risques
éventuels de retrouver du matériel exporté
depuis la France en face des troupes françaises sur
des terrains d'opérations et de prendre en
compte les impératifs commerciaux des industriels.
L'intérêt de cette commission réside
dans cette réunion de services aux sensibilités
propres afin de déterminer la ligne la plus impartiale
possible et le consensus est généralement
facilement atteint. Ainsi, la CIBDU est l'organe
national de référence pour arrêter une
position sur les dossiers les plus sensibles. Elle joue un
rôle politique, puisque c'est à son niveau
que sont déterminés les licences générales
nationales ou le champ de la clause « attrape-tout »
qui sont, comme on l'a vu en première partie, au
service d'intérêts spécifiquement
nationaux. Ainsi, en cas de véritable blocage sur un
dossier c'est bien le niveau politique qui tranche avec
une intervention du Premier Ministre. Les enjeux concernés
restent toutefois assez insensibles aux changements de
majorité. En effet, la lutte contre la prolifération
est un enjeu a-partisan et la Commission est donc un service
assez imperméable aux alternances. Par ailleurs, le
fait que le Ministère des Affaires Etrangères
de l'époque
ait souhaité en assurer la présidence témoigne
du rôle diplomatique que la France entend faire jouer à
ce contrôle. Ainsi, son rôle a été
relativement central au moment de la définition des
sanctions contre la Russie et la Commission a été
le théâtre de discussions plus intenses et
partagées que d'accoutumée. Il semble par
ailleurs important de rappeler que le ministre
en exercice à l'époque, Monsieur
Laurent Fabius, a fixé la diplomatie économique
en priorité de son mandat, en témoigne l'ajout
du Développement International au nom du Ministère.
Dès lors, le contrôle des exportations est plus
que jamais au coeur des préoccupations du
Ministère qui entend assumer cette présidence
de manière active. La composition de cette commission
et les intérêts qui y sont représentés
témoignent doublement de la dimension plurielle de ce
contrôle et de la nécessaire transversalité
de sa mise en oeuvre. Ainsi, la Douane, bien que seule
chargée du contrôle effectif des exportations,
ne peut en assurer seule tous les impératifs.
Toutefois, son rôle reste crucial.
-
Les
services douaniers
La direction générale
Il existe à la
Direction Générale des Douanes et des Droits
Indirects (DGDDI) un service dédié au contrôle
des exportations : la section prohibitions au bureau E2 de la
sous-direction E du Commerce International. Ce service est
chargé de la délivrance des autorisations
d'exportations pour de nombreux biens sensibles (armes,
produits explosifs etc.), mais depuis 2010 il n'est
plus en charge des biens à double usage. Seul un de
ses onze agents est en charge du suivi réglementaire
sur la question. Toutefois, le rôle de cette
administration reste important puisque la douane est un des
interlocuteurs privilégiés du secteur
industriel et commercial.
Les bureaux de douane
Le rôle premier
des Douanes reste le contrôle des flux physiques de
marchandises. Le premier contrôle est le contrôle
ex-ante, pendant le dédouanement, c'est le plus
important car le but premier de la douane est d'empêcher
les marchandises sensibles de quitter le territoire si elles
ne respectent pas la réglementation.
L'objectif des douanes
est de se focaliser sur les marchandises qui n'ont pas de
licence. Or seules 1% des marchandises font l'objet d'un
contrôle documentaire, soit d'après un plan de
contrôle établi par la direction générale,
soit à l'initiative du contrôleur des douanes.
Concrètement, la douane contrôle la validité
des licences, la nature des marchandises, la quantité
déclarée en volume et en valeur. Elle procède
à un contrôle plus poussé si la
déclaration est fausse ou si elle estime que la
marchandise est susceptible de contrôle. Le
bureau de douane dispose de tout pouvoir pour interroger
l'entreprise sur la nature de la marchandise et sa
destinationn finale, et éventuellement déclencher
un contrôle physique des marchandises. Au besoin, il
saisit la section spécialisée en biens à
double usage du service commun des laboratoires (douanes et
répression des fraudes) à qui il transmet la
facture, la liste de colisage et, en cas de contrôle
physique, la documentation saisie dans l'une des caisses,
ainsi que des photographies ou un échantillon de la
marchandise.
Les services
d'enquêtes
Dans le cadre des
contrôles a posteriori, les services régionaux
d'enquête (SRE) dépendant des directions
régionales ont la possibilité de faire des
enquêtes sur les exportations avec un effet rétroactif
de trois ans, mais c'est surtout la Direction Nationale des
Renseignements et Enquêtes Douanières (DNRED),
assistée de la Direction Générale de la
Sécurité Extérieure (DGSE), de la
délégation générale pour
l'armement (DGA) et du service des biens à double
usage qui réalise les plus grandes enquêtes en
matière de biens à double usage. La douane
judiciaire (SNDJ) peut aussi constater des infractions
relevant de l'article L 706-167 du code de procédure
pénale portant sur des affaires d'espionnage
technologique ou de transferts illicites dans le cadre de la
lutte contre la prolifération des armes de destruction
massive. Lorsqu'il existe un doute sur une opération
(sur le destinataire, le couple pays-produit ou l'opérateur
lui-même), l'initiative de l'enquête dépend
des douanes, de la commission interministérielle ou
encore des renseignements (DGSE, DRM, DNRED etc.). Toutefois
c'est bien la Douane qui est prioritairement chargée
de ces enquêtes car elle dispose de prérogatives
exorbitantes de droit commun qui découlent du code des
douanes. L'article 65 confère un droit de
communication et de saisie des documents, l'article 63 ter,
la visite des locaux professionnels et la saisie sur simple
information du procureur, ce qui permet une souplesse
d'action importante. Enfin l'article 64 permet la visite
domiciliaire sur ordonnance du juge des libertés.
Le
service commun des laboratoires (SCL)
Le
laboratoire des douanes de Paris continue
à exercer une activité d'expertise
en matière de BDU, bien que l'interprétation
de la règlementation relève
officiellement du ministère chargé
de l'Industie (SBDU), car beaucoup de contrôleurs
des douane demandent un avis de la part
des personnels scientifiques du SCL pour
savoir si peuvent autoriser les exportations
ou s'ils doivent consulter le ministère
de l'Industriepour obtenir une décision.
Le SCL opère ainsi un premier tri
quotidien pour éviter l'afflux quotidien
de "dossiers hors licence" au
SBDU.
-
La
Direction Générale de la Sécurité
intérieure (DGSI)
La DGSI intègre
sa mission de lutte contre les armes de destruction massive
dans le cadre de la protection du patrimoine économique
et déclare dans son site internet :
"Placée au
rang de priorité nationale par les autorités
gouvernementales, la lutte contre la prolifération
des armes de destruction massive s'intègre
également par essence à la protection
économique. Elle vise à prévenir et
neutraliser les activités de pays proliférants
sur le territoire national, en particulier l'acquisition
de biens à double usage ou de connaissances,
savoir-faire ou technologies, utiles à leur
programme d'arme de destruction massive.
Cette action s'appuie
là aussi sur un important travail de
sensibilisation des acteurs industriels et scientifiques
français mais comporte également un volet
répressif."
Ce point de vue de la
part d'un service de renseignement qui, officiellement, agit
seulement pour la "protection économique"
du pays, est assez surprenant car la liste des biens à
double usage n'est constituée que d'éléments
pour fabriquer des armes nucléaires, chimiques,
biologiques et leurs vecteurs ; et non des biens essentiels à
l'activité économique française
-
La
Direction Générale de la Sécurité
extérieure (DGSE)
La DGSE est plus claire
sur l'intérêt de la lutte contre la
prolifération des armes de destruction massive car
elle indique dans son site internet : "L 'action de
renseignement intervient tout au long du cycle de la
prolifération : en amont (anticipation et détection
des programmes par l'analyse d'indices variés),
pendant la crise et dans la période de l'après-crise.
En parallèle, La DGSE assure un suivi des réseaux
de prolifération pouvant être au contact de
mouvements terroristes. La conjonction potentielle entre
terrorisme et armes de destruction massive représente
une menace immédiate contre la sécurité
de la France et de ses alliés. Dans ce cas précis,
le recueil du renseignement et l'action d'entrave nécessitent
une capacité de réaction très rapide, en
fonction du niveau de la menace."
-
La
Direction Générale du Trésor
La France fait partie du
Groupe d'action financière (GAFI) qui est un
organisme intergouvernemental créé en 1989 par
les Ministres de ses états membres et dont le
secrétariat est établi à Paris. Les
objectifs du GAFI sont l'élaboration des normes
et la promotion de l'efficace application de mesures
législatives, réglementaires et opérationnelles
en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux,
le financement du terrorisme et les autres menaces liées
pour l'intégrité du système
financier international. Le Groupe d'action
financière est donc un organisme d'élaboration
des politiques qui s'efforce de susciter la volonté
politique nécessaire pour effectuer les réformes
législatives et réglementaires dans ces
domaines.
Le GAFI a élaboré
une série de Recommandations reconnues comme étant
la norme internationale en matière de lutte contre le
blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la
prolifération des armes de destruction massives.
Elles constituent le fondement d'une réponse
coordonnée à ces menaces pour l'intégrité
du système financier et contribuent à
l'harmonisation des règles au niveau mondial.
Publiées en 1990, les Recommandations du GAFI ont été
révisées en 1996, 2001, 2003 et plus récemment
en 2012 afin d'assurer qu'elles restent
d'actualité et pertinentes. Elles ont
vocation à être appliquées par tous les
pays du monde.
Parmi les
recommandations du GAFI de 2013 en matière des
anctions financières, celle qui concerne la lutte
contre la prolifération des armes de destruction
massive figure au paragraphe C, alinéa 7 reproduit
ci-dessous :
7. Sanctions financières
ciblées liées à la prolifération
Les pays devraient mettre en oeuvre des
sanctions financières ciblées conformément
aux résolutions du Conseil de sécurité
des Nations Unies relatives à la prévention,
la répression et l'interruption de la
prolifération des armes de destruction massive et
de son financement. Ces résolutions obligent les
pays à geler sans délai les fonds et autres
biens de, et à s'assurer qu'aucun fonds
ou autre bien ne soit mis, directement ou indirectement, à
la disposition ou au profit de toute personne ou entité
désignée par le ou sous l'autorité
du Conseil de sécurité des Nations Unies au
titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
En application de cette
recommandation, la Direction générale du Trésor
du Ministèere de l'Economie et des Finances est
chargée du blocage financier des exportations
suspectes en matière d'esportation de biens à
double usage. Cette administration indique, dans son site
internet :
"Il appartient à celui qui prend la
responsabilité d'exporter de connaître
l'utilisation potentielle de ses biens et de savoir
les qualifier
....
En tenant compte de la législation
particulière en matière de biens à
double usage
Il est toujours obligatoire de respecter la
législation nationale relative à
l'exportation de biens à double usage, qu'il
y ait ou qu'il n'y ait pas de sanctions
internationales. Certains Règlements (UE) peuvent
de surcroit durcir les conditions d'exportation des
biens à double usage. Dans ces conditions, nous
recommandons de prendre connaissance de la législation
en matière d'exportation de biens à
double usage et de vous renseigner auprès
de Direction générale
des entreprises(DGE, anciennement
DGCIS) Ministère de l'Économie, de
l'Industrie et du Numérique Service des biens à
double usage (SDBU)."
Ainsi le rôle de
la Direction Générale du Trésor réside
dans le contrôle des flux financiers issus des pays
tiers pour payement des exportations françaises. La
DGT est ainsi compétente pour procéder au gel
des transactions financières. En vertu de l'article
L.562-2 du code monétaire et financier, le ministre
chargé de l'économie, et par extension la
DGT, peut en effet
"
... décider le gel d'une partie des fonds,
instruments financiers et ressources économiques
qui appartiennent à des personnes
physiques ou morales, organismes ou entités qui ont
commis […] des actes sanctionnés ou prohibés
par [des résolutions adoptées dans le cadre
du chapitre VII de la Charte des Nations Unies ou des
actes pris en application de l'article 15 du traité
sur l'Union européenne]"
Ainsi, au-delà
des sanctions pénales déjà évoquées
dans la première partie de ce travail, les pouvoirs
publics français peuvent empêcher le payement
d'une transaction déjà effectuée
et sanctionnée a posteriori. Le bureau des
investissements, de la lutte contre la criminalité
financière et des sanctions de la DGT est le service
responsable de la mise en oeuvre de ces sanctions. Les
fonds ne sont toutefois pas confisqués par la DGT mais
simplement « bloqués ». L'opérateur
français, ou situé sur le sol français,
sanctionné est donc simplement dans l'incapacité
d'accéder aux capitaux versés en
contrepartie des exportations visées. Les conséquences
économiques pour une entreprise sont toutefois
importantes en raison des trous de trésorerie majeurs
qui en découlent.
En cas de doute, les
fonds versés en acompte ou en paiement ne sont pas
confisqués mais bloqués par les banques par
ordre de la direction générale du Trésor,
ce qui présente quand même un grand danger pour
les entreprises qui ne connaissent pas bien la règlementation
et qui peuvent ainsi perdre des marchés en n'honorant
pas leurs contrats ou se retrouver dans une situation
financière dificile en n'étant pas rémunéré
de leurs vente. La situation est très pénible
de la part des entreprises si les administrations concernées
s'acharnent à empêcher le départ d'un
produit, d'un matériel ou d'un équipement libre
à l'exportation par peur de laisser passer du matériel
statégique ou en attente d'une décision
éventuelle d'application de clause attrape-tout qui
peut prendre plusieurs mois.
C'est un aspect du
contrôle souvent oublié des opérateurs
qui peut engendrer des oublis de formalités
administratives et provoquer le gel excessif de certaines
transactions. Ainsi, à travers l'action de ces
quatre services spécifiques, il apparaît assez
clairement que c'est un maillage administratif complexe
et composé de nombreux acteurs qui est en charge de la
mise en oeuvre de cette politique. Comme dans tout
dispositif de ce type, la complexité est parfois
pointée du doigt pour sa potentielle inefficacité
et les inconvénients bureaucratiques et administratifs
qu'elle peut engendrer. C'est ce bilan que tente
de dresser le «rapport d'orientation sur le
rapprochement des dispositifs de contrôle des
transferts des technologies civiles et militaires sensibles »
de janvier 2014 établi par la Cour des comptes, dit «
rapport Hespel » du nom du président de la
mission.
l'U.S. Export control system
Le
gouvernement américain contrôles
les exportations de biens, de technologies et
des logiciels sensibles, aussibie pour renforcer
ses intérêrs de sécurité
nationale que pour des objectifs de politique
étrangère.
En résumé
du tour d'horizon historique sur la lutte contre la
prolifération des armes de destruction massive, on
peut dire que la prise de conscience d'un espionnage
technologique visant à produire des armes nucléaires
a commencé dès les années 50 lorsque
l'ex-URSS a procédé des essais d'une arme
nucléaire copiée sur celle de Nagasaki, puis
des essais d'armes thermonucléaires superpuissantes
obtenues à nouveau à partir des transferts
clandestins du savoir-faire américain, pourtant classé
ultra secrêt. Pour lutter contre ce pillage
technologique désastreux de la part de cette nouvelle
grande puissance nucléaire et compte tenu de
l'existence de la "guerre froide" commencée
dès la première crise de Berlin (de juin 1948 à
mai 1949), les USA, la France, l'Italie, le Royaume Uni, les
Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg ont créé
en 1950 un comité chargé de contrôler ou
d'interdire les exportations vers les pays sous contrôle
soviétique, des biens et technologies à usage
civil susceptibles d'un usage militair ; c'est à dire
pour empêcher les "pays de l'est" d'acquérir
une supériorité stratégique contre les
Etats Unis d'Amérique et les pays européens.
C'est ainsi que ces sept pays ont fondé un Comité
de coordination pour les échanges multilatéraux
(COCOM) auquel se sont joints rapidement le Canada, le
Danemark, l'Allemagne, le Japon, l'Australie, l'Espagne, la
Grèce, l'Australie, le Portugal et la Turquie. Les
travaux de l'ex-COCOM qui fut un comité "informel
et secrêt" étaient tellement confidentiels
que cet embargo contre les pays de l'ex-"bloc
soviétique" est finalement devenu inopérant.
Ce n'est qu'au cours des années 70 et 80 que les pays
occidentaux se sont aperçus qu'avec le
perfectionnement de la technologie des missiles V2 allemands
de la deuxième guerre mondiale, l'ex-URSS avait réussi
à se doter de missiles balistiques de longue portée
et précis, et que beaucoup d'autres pays les avaient
copiés pour produire des missiles SCUD. De même,
les pays occidentaux se sont inquiétés des
essais nucléaires réalisés par ce que
l'on appelait à l'époque "les pays du
tiers monde", et de l'utilisation d'armes chimiques
produites au moyen des technologies et des équipements
à usage civil disponibles dans le commerce
international. Les états industrialisés se sont
alors ressaisis en réactivant l'ex-COCOM, en créant
les régimes multilatéraux de contrôle de
la prolifération des armes de destruction massive et
de leurs vecteurs : (NSG, MTCR et AG) et un invitant de
nombreux pays à signer le traité de non
prolifération des armes nucléaires (TNP).
Malgré toutes ces précautions, il est apparu, à
l'époque des progrès extraordinaires de la
micro-électonique et de l'informatique, que les
pillages technologiques ne faisaient que s'accentuer, non
seulement au profit de l'ex-URSS mais aussi de beaucoup
d'autres "états proliférants". Une
courte pause de vigilance en matière de lutte contre
la prolifération des armes de destruction massive est
arrivée au début des années 90, après
la chute du mur de Berlin et le disparition de l'ex-URSS
Toutefois, l'Union européenne s'est saisie du problème
en créant une règlementation directement
applicable dans ses Etats membres, compte tenu des faiblesses
juridiques en matière de contrôle des biens à
double usage dans chacun des ces états, où les
poursuites judiciaires contre les trafiquants furent
largement contestées. La dislocation des moyens
militaires de l'ex-URSS (y compris nucléaires) et
l'attentat du 11 septembre 2001 à New York, suivi par
des guerres et des actions de terrorisme au Moyen Orient, ont
conduit les états industrialisés à
accroître leur vigilance au cours des années
2000-2010 par la création de l'initiative de sécurité
contre la prolifération (PSI) et la mise en oeuvre
d'embargos contre plusieurs pays non démocratiques.
Ils ont finalement renforcé les bases juridiques leurs
règlementations à la suite de la résolution
n° 1750 (2004) du Conseil de Sécurité des
Nations Unies.
Situation actuelle et
perspectives
En France, les moyens
juridiques pour lutter contre les trafics de biens à
double usage et la prolifération des armes de
destruction massive paraissent complet, d'autant que le
règlement du conseil européen N° 428/2009
modifié prévoit une "clause attrape-tout"
permettant d'interdire à l'exportation des
marchandises ne figurant pas sur les listes de contrôle
des biens à double usage ou soumis à
restrictions vers certaines destinations. En fait, cette
disposition peu conforme au droit français (qui doit
être écrit) aboutit à des blocages
intempestifs de la part du service des biens à double
usage français (SBDU) lorsqu'une entreprise demande
des renseignements sur un projet, ou de la part des
contrôleurs des douanes qui ont des difficultés
à interpréter les listes de biens visés,
ou encore de la part de la direction générale
du trésor du ministère de l'économie et
des finances qui ordonne aux banques de bloquer les acomptes
ou les paiements venant de l'étranger ( en cas de
doute sur une opération) pendant des semaines
d'attente de la réponse du SBDU.
De plus, l'intégration
de renvois dans le tarif intégré communautaire
(TARIC) des codes correspondant aux articles et alinéas
des listes de biens à double usage, ou de biens soumis
à restrictions à l'exportation vers certains
pays, ne permet pas aux contrôleurs des douanes de
savoir exactement ce qui est visé dans une
sous-position de la nomenclature combinée du tarif
douanier commun.
Les sanctions douanières
et pénales sont sévères a posteriori en
cas de découvertes de détournements de produits
et technologies sensibles, mais il est difficile en pratique
d'empêcher les exportations illicites avant leur
départ, ou de s'opposer aux opérations
clandestines de courtage et de transferts intangibles de
technologies sans moyens efficaces de renseignement. En
France, la coordination du contrôle des biens à
double usage et des embargos revient au Ministère des
affaires étrangères qui assure la présidence
de la commission interministérielle des biens à
double usage, mais le problème n'est pas seulement
diplomatique. Comme l'a souligné le rapport
d'orientation de la Cour des Comptes de janvier 2014, la
coordination intermistérielle devrait être
assurée au niveau des services du Premier Ministre,
c'est à dire par le secrétariat général
de la défense et de la sécurite nationale
(SGDSN), comme avant la première réforme de ce
service en 1996 (ex-SGDN) qui, d'aprés ses
attributions définies par décret, était
à l'époque chargé de la coordination du
renseignement.
Il existe de plus en
plus un risque de prolifération d'armes de destuction
massive, non seulement vers des états non
démocratiques, mais aussi au profit des grandes
organisations terroristes actuelles qui ont pour objectif
d'envahir l'Afrique noire et le moyen orient, et de détruire
nos civilisations. La plus grande menace actuelle est la
construction d'une arme nucléaire de plusieurs de
tonnes au moyen de quelques dizaines de kilogrammmes de
plutonium 239 récupérés après le
démantèlement de l'armée soviétique
ou détournée par des complicités
internes dans les usines nucléaires. Cette bombe
serait embarquée dans un conteneur maritime pour
exploser en mer et causer un tsunami dévastateur, ou
dans un camion qui stationnerait dans une grande ville pour
la détruire.